Le Sushi et sa dépression ont de petites habitudes, de petits rituels, de petites manies pour cohabiter. La dépression n’étant pas sentimentale, elle interdit au Sushi de pleurer. Ce n’est pas digne d’un Sushi. Il doit rester fort et fier et intérioriser, sa dépression l’a décidé. Et il ne faut jamais contrarier (ni tenter de droguer) une dépression si on ne veut pas qu’elle s’échappe définitivement.
Le Sushi est néanmoins persuadé que laisser quelques larmes s’échapper est indispensable à son relatif équilibre psychologique, et a trouvé une feinte qu’il a présenté à sa dépression comme un compromis, une soupape de sécurité: Ce qui n’est pas réel peut l’atteindre le temps d’un visionnage, laisser une larme couler sur sa joue est acceptable et en aucun cas une attaque envers sa dépression si les faits qui déclenchent cette larmes sont fictifs. Le Sushi a ainsi une liste de séries télévisées qu’il regarde quand il sent que trop d’émotions contradictoires cohabitent en lui. Sanglotter devant son écran est alors un bon moyen de relacher la pression.
Le Sushi a ainsi récemment rattrappé tout son retard en séries américaines et se trouva à court de nourriture lacrimale. Il se rappela alors qu’il avait pensé s’attaquer à Dexter, sans jamais le faire. Il s’installa donc devant le pilote, enroulé dans une couverture - le Sushi ne parlera pas de météo, mais le Sushi aimerait que le mois de juin ne ressemble pas à un mois de novembre - un verre de jus de citron chimique à portée de main. Et le Sushi attendit, un peu anxieux de ce qu’il allait découvrir.
Après quelques minutes, le Sushi oublia la réalité. Il en oublia même sa dépression. Il entra dans le monde de Dexter. Le pitch, pour ceux qui ne connaissent pas:
Dexter Morgan est expert médico-légal pour la police de Miami. Sa spécialité: le sang. Mais sur son temps libre, Dexter est également serial-killer. Son père adoptif, policier, ayant très vite remarqué que son fils était “différent”, lui a appris à commettre des crimes parfaits, et à canaliser ses pulsions en ne s’attaquant qu’aux gens qui le méritent. Le jour, Dexter travaille avec sa sœur, qui a choisi la même voie que leur père, et fréquente Rita, mère célibataire dont l’ex mari est en prison. La nuit, il débarrasse Miami de ceux dont les crimes demeurent impunis. Tentant toujours de maintenir les apparences et de simuler des émotions. Jusqu’à ce qu’un nouveau compagnon de jeu arrive: the Ice Truck Killer.
Et que dire… Que malgré son impossibilité à ressentir les émotions, Dexter est plus humain que les gens “normaux” qu’il traque. Que sa relation avec son père est atypique et émouvante. Un père qui a compris que son fils adoptif ne sera jamais comme les autres, et qui décide de l’aider en lui apprenant une certaine notion du bien et du mal, et en l’épaulant pour qu’il ne sombre jamais. Qu’on sent sa difficulté à feindre des émotions alors qu’il se sent creux, mais qu’il sait qu’il doit à tout prix paraître normal. Que les phrases telles que (traduction sauvage) “Si je pouvais aimer quelqu’un, ce serait elle” sont touchantes de franchise et de simplicité. Qu’on tremble au final en espérant qu’il s’en sorte.
Tout ne pouvant être parfait, l’identité de l’Ice Truck Killer est très vite évidente. Mais le Sushi continue à suivre avec plaisir la danse macabre à laquelle se livrent Dexter et son rival, en se demandant si celle qui semble être une victime toute choisie s’en sortira ou non. Le Sushi continue à trembler, le Sushi continue à sursauter, le Sushi est Dexter addict.