Alexandre Lacroix, directeur de la rédaction de Philosophie magazine, travaille depuis plusieurs mois à l’ouverture d’une école d’écriture à Paris. « Les Mots » verra le jour le 30 janvier prochain, dans le 5ème, à Paris et sera accessible à tous. Son président a bien voulu répondre à nos questions.
SOS Éducation : Votre école, « Les Mots » ouvrira ses portes le 30 janvier prochain. Pourriez-vous nous en dire plus sur son concept ?
Alexandre Lacroix : C’est assez simple : les périodes les plus intéressantes de l’histoire de la littérature française ont été marquées par la vitalité de certains lieux de transmission de la passion d’écrire. Les salons littéraires ont joué un rôle important aux XVIIIe et XIXe siècles, puis au XXe siècle les revues d’avant-garde ont pris le relais… Aujourd’hui, pour des raisons sociologiques, il n’existe plus tellement d’endroit où un écrivain novice pourrait aller rencontrer ses pairs, lire ses textes, bénéficier de conseils. C’est très dommageable. Nous voulons donc créer une école d’un nouveau type, où chacun peut suivre des ateliers d’écriture donnés par des écrivains de métier. Par ailleurs, il est incompréhensible que tous les arts aient une transmission bien organisée – songez aux écoles des Beaux-Arts, aux conservatoires de musique et de danse, aux cours de théâtres innombrables – et non la littérature.
SOS Éducation : Cette école sera donc accessible à tous ?
Alexandre Lacroix : Oui, il n’y a aucun cursus exigé, pas de sélection à l’entrée, et nous avons essayé d’avoir un tarif accessible, avec des cours à quinze euros de l’heure, soit le prix d’un cours collectif de danse ou de musique. Cette ouverture correspond aussi à un désir de remettre la littérature et les écrivains, dans un rôle de transmission, au cœur de la cité.
SOS Éducation : Quels types d’enseignements y seront proposés ? Par qui ?
Alexandre Lacroix : Beaucoup d’auteurs se sont enthousiasmé pour le projet des Mots et assureront ces ateliers : Yannick Haenel, Marin de Viry, Isabelle Sorente, Tobie Nathan, Alice Zeniter, Ollivier Pourriol, Jean Birnbaum ou encore Pierre Grillet, qui enseignera l’écriture de paroles de chansons, car nous sommes ouverts sur tous les genres… Nous partons en effet du principe qu’il existe une hiérarchie des œuvres, mais non des genres. Autrement dit, si la plupart des ateliers sont liés à l’art du roman, bien d’autres voies seront explorées : le scénario avec Cécile Ducrocq, qui a participé à l’écriture de nombreuses séries comme Le Bureau des légendes, le scénario de bande dessinée avec Loo Hui Phang, le one-man-show avec l’humoriste Michaël Hirsch, le blog avec Vanessa Caffin. Tous des auteurs talentueux, ayant fait leurs preuves dans leurs domaines d’expression respectifs.
SOS Éducation : Comment vous est venue cette idée ?
Alexandre Lacroix : J’enseigne l’écriture créative, à Sciences Po et ailleurs, depuis 2003. Lorsque je me suis lancé en 2005 dans l’aventure de Philosophie Magazine, dont je suis encore aujourd’hui directeur de la rédaction, j’avais déjà envie de créer cette école. J’ai mis ce projet entre parenthèses pendant une dizaine d’années, mais ne l’ai pas abandonné. Maintenant, ce vieux rêve devient réalité. Par ailleurs, il y a un point commun entre Philosophie Magazine et les Mots : dans les deux cas, il s’agit d’inventer une nouvelle forme de pédagogie. La philosophie, la littérature ne sont pas innées, elles nécessitent un apprentissage, lequel ne devrait pas se faire, à mon sens, seulement dans les institutions académiques ou scolaires (même si ces dernières sont évidemment fondamentales). Il me semble que les intellectuels ont presque un devoir moral que de se pencher sur la pédagogie, dans le monde actuel. La passion pour la littérature et la philosophie n’a plus rien d’une évidence et elle doit être entretenue activement.
SOS Éducation : Etre écrivain, selon vous, cela s’apprend ?
Alexandre Lacroix : Promettre à quelqu’un qu’il deviendra le prochain Baudelaire ou le prochain Proust, ce serait lui mentir. Néanmoins, n’importe qui peut progresser dans la maîtrise de l’écriture. C’est comme pour tous les autres arts, ou pour le piano si vous voulez : nul professeur ne peut faire de son élève le prochain Chopin ou Gould, néanmoins, il est possible de former un bon pianiste. C’est déjà formidable !
Toutes les informations sont disponibles sur le site : www.lesmots.co