Le livre commence par "L'année avait été rude. Longtemps, les dieux avaient favorisé la famille, nous avaient baigné de leur douceur. Peut-être se penchent-ils sur certains d'entre nous, comme les fées des contes ? Puis leur sourire se crispe en grimace."
Je surnomme ce jeune et brillant écrivain "le souffleur de verre", tant ses mots s'entrechoquent, risquant à chaque instant de rompre par l'effet d'une telle densité. Mais c'est l'acrobate qui est tombé de haut le 20 août 2014. La Vie et la Camarde ont tenu conseil, et le tir de semonces l'a emporté sur le coup de grâce. Sylvain Tesson, le corps abîmé et la plume intacte, a alors entrepris sa marche "sur les chemins noirs".
Si le pas est moins vif comme l'esprit est moins léger, la gravité fait son office : les pieds du voyageur foulent la Terre-mère dans ses tréfonds ruraux jusqu'aux confins d'un monde ancien. Des bizarreries du changement à la nostalgie d'un monde fantasmé, il n'y a qu'un pas que Sylvain Tesson franchit, tel un Sisyphe de l'absurdité du monde actuel. Le rejet est poli. L'homme est bien élevé. Et la géographie devient la Muse de celui qui se fait poète de l'éternité.
Je remercie la chute d'avoir déstabilisé un temps la pudeur. Cette fenêtre qui s'entre-ouvre sur quelques chemins intérieurs est bouleversante.
Quelques informations pratiques sur ce livre.
La biographie de l'Auteur, bibliographie.