Le poison du doute fait son œuvre. Soupçonnée d’avoir favorisé les intérêts d’une compagnie pétrolière et de son compagnon, la ministre italienne du développement économique Federica Guidi a dû démissionner, bien que’elle ne soit pas mise en examen. Mais le nom d’autres membres du gouvernement, comme celui de Maria Elena Boschi (ministre des réformes et des relations avec le Parlement) ou de Graziano Delrio (ministre des transports) sont cités dans la presse sans que l’on sache à quel point ils sont impliqués dans cette affaire.
Résultat immédiat : selon un sondage de l’institut Demos publié dimanche 10 avril par le quotidien La Repubblica, 45 % des Italiens estiment que le gouvernement devrait démissionner en raison du soupçon de conflit d’intérêt (50 % pensent le contraire). 45 % également ont le sentiment que la corruption « est plus diffuse » dans le pays qu’à l’époque de Tangentopoli dans les années 1992 et 1993 – une vaste affaire de corruption qui avait décimé les responsables politiques et favorisé l’arrivée au pouvoir de Silvio Berlusconi en 1994.
Même s’il garde une cote de popularité enviable (40 %), il s’agit de son niveau le plus bas depuis son arrivée au pouvoir. On est loin des fastes des élections européennes de 2014 quand il avait atteint le score faramineux de 74 % de bonnes opinions. Sa formation, le Parti démocrate (PD, centre gauche) paie aussi la note : il ne réunit plus que 30,1 % des intentions de vote.
Trois scrutins à venir
Parallèlement, et conséquemment, le Mouvement 5 étoiles croît encore. Selon Demos, il se situe à 27,3 %. En cas d’élections législatives, désormais prévues sur deux tour, le « non-parti » de Beppe Grillo l’emporterait sur le PD en cas de ballottage. En outre, 31 % des Italiens estiment qu’il est le plus crédible sur la thématique de la lutte anti-corruption, contre 11 % pour la ligue du Nord et seulement 9 % pour le PD.
Pour le politologue Ilvo Diamanti, « on assiste à un refroidissement de l’opinion » vis-à-vis du premier ministre. Mais selon lui, à la différence de l’époque de Tangentopoli, les électeurs s’en remettent davantage à certains responsables politiques plutôt qu’aux magistrats. C’est dans ce climat de défiance que doivent se dérouler trois scrutins d’inégale importance, mais dont le président du conseil sera comptable quoi qu’il arrive – un référendum sur les forages en mer le 17 avril, le 5 juin le premier tour des élections municipales dans cinq grandes villes (Milan, Turin, Bologne, Rome et Naples) et, en octobre, le référendum sur la réforme des institutions.
Philippe Ridet