Cela n’arrive pas qu’aux autres. Le Mouvement 5 Etoiles qui était resté indemne des tares qu’il reproche aux élus des autres partis est à son tour pris dans la tourmente des affaires qui, depuis quelques semaines, balaye l’Italie avec une attention particulière pour les membres du Parti démocrate (PD, centre gauche) dirigé par le chef du gouvernement Matteo Renzi. A quatre semaines des élections municipales dans 1300 communes – dont Rome, Milan, Turin et Naples – les partisans de Grillo en avaient retiré une nouvelle preuve que, mis à part eux, tout le monde était pourri.
L’argument s’est écroulé dimanche 7 mai lorsque le maire de Livourne (la ville la plus importante dirigée par le M5S après Parme), Filippo Nogarin, a annoncé sur Facebook sa mise en examen pour banqueroute frauduleuse d’une société de ramassage d’ordures gérée par la ville. C’est une première pour le parti fondé par Beppe Grillo sur le principe cardinal de l’honnêteté de ses membres. La règle d’airain du Mouvement voudrait qu’il démissionne (ce que Nogarin envisage de faire). Toutefois, l’état-major du Mouvement, et Beppe Grillo en tête, lui ont conseillé de n’en rien faire et d’attendre.
Cette nouvelle pèsera sur la suite de la campagne électorale. Elle prive le M5S d’un argument majeur et d’une réputation morale jusque-là à toute épreuve. Alors que le PD est englué dans une série d’arrestations, de mises en examens, et de condamnations de plusieurs de ses élus, les partisans de Beppe Grillo avaient le vent en poupe au point d’apparaître, selon les sondages, en favoris pour prendre les rênes de la mairie de Rome.
Depuis le 1er avril et la démission de la ministre du développement industriel pour « favoritisme », pas un jour ne se passe, en effet, sans qu’un élu du centre-gauche ne soit dans le collimateur de la justice. Le 23 avril, Stefano Graziano, conseiller régional de la région de Campanie était mis en examen pour association mafieuse. Le 29, Tony Bonafede, conseiller municipal de Syracuse (Sicile), était arrêté en possession de 16 kg de marijuana et 3,5 kg de hashish. Le 3 mai, Simone Ugetti, maire de Lodi (Lombardie), était mis en détention pour manipulation des procédures d’appel d’offres. Enfin, le 5, Renato Soru, ancien gouverneur de Sardaigne et député européen, était condamné en première instance à trois ans de prison ferme pour évasion fiscale.
Bref, du velours pour le Mouvement 5 Etoiles qui regardait tomber les hommes de Matteo Renzi avec gourmandise et un rien de cruauté. Ironie du sort, le principal lieutenant de M5S, Luigi di Maio, était à Lodi (Lombardie) pour réclamer la démission du maire, quand il a appris la mise en examen de Filippo Nogarin…
Philippe Ridet