La Chine a formellement levé, lundi 6 janvier, une interdiction de vente des consoles de jeux vidéo. Les groupes étrangers produisant des consoles de jeux vidéo dans la zone franche de Shanghai (ZFS), inaugurée fin septembre, seront autorisés à les vendre dans le pays après inspection des autorités culturelles, explique un communiqué gouvernemental. Olivier Vialle, associé stratégie chez PwC et expert du marché du jeu vidéo chinois, décrypte ces annonces.
Les autorités chinoises mettent fin à une interdiction des ventes sur consoles qui a débuté en 2000. Cette décision marque-t-elle une réelle ouverture ?
Jusqu’à présent, la vente des consoles de jeu était interdite pour des raisons idéologiques, afin de préserver la jeunesse de supposés méfaits. Une telle décision a eu deux conséquences sur le marché. En Chine s’est développé un marché gris très important. Le pays est producteur donc, il se trouvait naturellement des consoles sur place, pas nécessairement importées. Cette annonce officielle entérine donc plutôt un état de fait.
L’autre conséquence, est d’avoir reporté la consommation de jeux vidéo sur le PC. Dans les années 2000, des genres comme les jeux de rôle massivement multijoueurs ont pu prendre leur essor, tout comme le modèle économique « freemium » [NDLR : permettant un accès gratuit au jeu, mais disposant de contenus additionnels payants].
Le document officiel des autorités est assorti de plusieurs réserves. La durée de la levée de l’interdiction est « temporaire » par exemple…
La Chine avance de façon prudente. Plutôt que de revenir plus tard sur leur décision, les autorités préfèrent se laisser l’option de revenir en arrière.
Le texte assouplit-il le contrôle du contenu des jeux ? Récemment, les autorités ont tancé l’éditeur américain Electronic Arts, après la sortie fin décembre d’une extension de son jeu de tir Battlefield 4, qui se déroule en Chine.
Le contrôle éditorial est maintenu, comme c’est le cas pour tous les autres médias en Chine. Dans le cas de la nouvelle extension de Battlefield, la Chine n’était pas présentée sous son meilleur jour et le scénario incluait des éléments de rebellion contre le pouvoir chinois. Mais la Chine est loin d’être le seul pays à exercer un contrôle éditorial sur les jeux…
Est-ce que les consoliers se félicitent du marché potentiel qu’offre la Chine, après la sortie des machines de nouvelle génération ?
Les consoliers ont réagi tièdement à cette ouverture. D’abord parce que l’achat d’une console – et de ses jeux – représente un fort investissement en Chine, l’équivalent d’environ un mois de salaire. Par ailleurs, si le marché de la console de salon s’ouvre, il pourrait également s’ouvrir à la contrefaçon. Et enfin, après près de 15 ans d’interdiction, le joueur chinois est éduqué au jeu PC, et il sera pour lui plus difficile de passer à la console.
Un acteur local pourrait-il imposer une console de salon ?
La Chine dispose des capacités pour fabriquer des consoles, mais rencontreraient-elles le succès ? Si un acteur chinois décidait d’entrer sur ce segment, les machines n’auraient pas grand chose à voir avec celles que nous connaissons en Europe et aux Etats-Unis. Elles seraient moins chères, pour être plus accessibles, et l’objectif de la console ne serait pas d’en faire un centre dédié au divertissement.
Propos recueillis par Laurent Checola
Crédits : AFP PHOTO/Peter PARKS.