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#Aftersex : les selfies après l’amour existent-ils vraiment ?

Publié le 06 avril 2014 par Manstrau
#Aftersex : les selfies après l’amour existent-ils vraiment ?

« Mais, ça existe vraiment ??? », se demande un utilisateur d’Instagram.

#AfterSex : mot-clé désignant des photos supposément prises après un acte sexuel puis postées sur les réseaux sociaux. Cette « tendance », qui concerne en particulier Instagram, a été dénichée à la fin de mars par le site américain Nerve, puis reprise par BuzzFeed, ComplexTech, Cnet, puis par le Time, le DailyMail, le Guardian, etc.

Selon Slate, reprenant une chronique parue dans le Guardian, l’utilisation de ce mot-clé attesterait d’« une trahison ultime de l’intimité » et de l’omniprésence de la « culture du porno, [et d’]une hyperréalité dopée au sexe où tout le monde doit en permanence en faire ou en parler ».

De telles critiques sont relayées par bon nombre de titres de presse mentionnés ci-dessus. Seul le Daily Dot n’y voit pas trop d’inconvénients, estimant plutôt que ce n’est pas très intéressant comparé à d’éventuels « #presexselfies ».

Mais faut-il vraiment donner à #aftersex autant d’importance ? A la date du 5 avril, l’occurrence et ses dérivés (#aftersexselfie, #aftersexhair, etc), comptabilisaient environ 9 000 photos référencées sur Instagram.

aftersex

Parmi ces photos se trouve un nombre très important de blagues, d’autoportraits ou d’images n’ayant rien à voir avec un acte sexuel — vous pouvez les parcourir pour en avoir le cœur net, sans avoir de grands risques de tomber sur des images à forte connotations sexuelles, Instagram pratiquant une politique de censure féroce en ce qui concerne la nudité.

Le 27 mars, alors que les articles de la presse en ligne sur le sujet n’avaient pas encore tourné sur les réseaux sociaux, le chroniqueur de Cnet qui s’intéressait au phénomène indiquait avoir recensé 3 000 photos sur Instagram #AfterSex.

L’idée de faire cette recherche lui était venue à la lecture de l’article de Nerve, qui répondait, plutôt intelligemment, à la question « pourquoi des couples postent-ils des photos sur #Aftersex ? » L’auteur de Nerve étaie son analyse par quelques photos de la sorte trouvées sur Instagram, après avoir été alerté de l’existence de ce mot-clé sur Reddit.

En réponse, le journaliste de Cnet, après avoir observé les résultats de sa recherche, ne cachait pas son scepticisme.

« La plupart des contributions au hashtag étaient décevantes. Certains étaient des blagues ou des dessins. Il y avait des photos de James Franco, Cam Newton, Miley Cyrus. Il y avait même la photo d’un homme et de son chien — je crois pouvoir affirmer qu’il s’agissait d’humour. En l’état, parmi les photos qui peuvent vaguement suggérer une vraie pose post-coïtale (environ 10 % des photos, selon mes estimations), très peu montraient des personnes nues. »

Source : Instagram. http://instagram.com/p/klOQTbPguL/

Source : Instagram.

En l’occurrence, en reprenant les chiffres de cet article, ce seraient alors environ 300 photos (10 % de 3 000) qui montraient des photos crédibles de personnes supposément représentées « après l’amour », avant que les médias ne s’emparent du sujet. Le même journaliste pointe également à juste titre l’impossibilité de savoir si l’acte sexuel a eu lieu, et préfère parler de mise en scène.

Ces quelques centaines de photos crédibles posent bien sûr des questions intéressantes sur les raisons qui ont poussé ces personnes à les poster (ou plutôt à écrire de tels mots-clés sous des photos pouvant faire croire qu’elles ont été prises après l’amour) : il s’agit d’ailleurs du but original de Nerve, qui ne parle pas de tendance, mais s’interroge bien sur quelques exemples particuliers. Ces questions font écho à celles, passionnantes, qui entourent de manière plus large la pratique du selfie.

Source : Instagram.

Source : Instagram.

Mais si ces derniers sont bien un véritable raz de marée à l’échelle des réseaux sociaux (avec plus de 100 millions d’occurrence de #selfies recensées pour le seul Instagram), le mot-clé #aftersex ressemble, en comparaison, à un maigre vaguelette.

Le site australien DailyLife évoque avec justesse une « tendance » éphémère, une de celles qui apparaissent et disparaissent chaque jour  sur Instagram, Twitter, et qui sont bien vite oubliées ou remplacées. Le même article évoque par exemple le jeu du #babysuiting, qui consiste à enfiler à son bambin un costume bien trop grand pour lui : au 5 avril, ce sont 255 photos qui avaient été postées sur Instagram (on n’est pas loin des 300 photos repérées initialement par Cnet).

Même le « Time », pourtant très critique envers cette pratique (l’article est intitulé « #Aftersex : les selfies dont nous n’avions pas besoin »), reconnaît qu’il ne s’agit pas vraiment d’une tendance, et s’en prend d’ailleurs au « Daily Mail », qu’il accuse de vouloir en générer une.

« Il est certain que beaucoup des photos recensées sur #AfterSex sont fausses — parce que, soyons francs, poster des photos de soi nu sur Internet de nos jours prouverait un manque flagrant de discernement. Mais ce n’est pas ce qui compte. En déclarant que ce mot-clé est une “tendance”, elle en deviendra une. Et il est certain que des articles comme celui-ci encourageront davantage de personnes à partager des photos d’eux dans une posture d’extase. »

Un autre article très critique de Jezebel, évoquant avec l’#Aftersex « un sommet de connerie, (…) le point culminant d’une mode qui a commencé à la fin des années 2000 avec des statuts Facebook plein d’entrain et des photos de profil flatteuses soigneusement sélectionnées », se réjouit du fait que le mot-clé était déjà en train de s’autodétruire en raison du nombre de photos parodiques l’ayant déjà submergé.


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