Au soir de la primaire de la droite, Le Monde a recueilli le témoignage d’un jeune partisan de Sarkozy (cela existe, comme existèrent jadis les « jeunes Républicains indépendants », moqués par Jean Ferrat) déçu, forcément déçu, et qui attribuait la victoire de F. Fillon au déplacement en masse pour voter à cette primaire des « lodens ». Cela nous a paru assez pertinent, mais la référence audit loden peu compréhensible par les jeunes générations.
Il nous souvient d’une manif à Paris des agriculteurs contre le gouvernement de Mitterrand, au début des années 1980, où nous avions vu les « lodens » défiler en rangs serrés, cohorte uniformément vêtue de drap vert : les céréaliers de l’Ile-de-France, vrais capitalistes et premiers bénéficiaires des aides de l’Europe (ce qui fait d’eux des sortes de fonctionnaires, mais ce ne sont pas ceux-là qui sont visés par les programmes électoraux fonctionnairicides). La FNSEA avait eu l’intelligence de ne pas les mettre au premier rang, mais plutôt des petits paysans plus pittoresques, dont des bergers landais montés sur échasses.
Le loden est un manteau masculin prisé par les gens cossus, essentiellement en province, ce que l’on appelle aussi le « beau linge ». Il existe certainement des photos de Fillon en loden. Il est vrai qu’il incarne parfaitement ce milieu réac, catho et coincé, aimant peu la CGT. Il représente d’ailleurs pour le PS une « divine surprise » : n’importe quel candidat de ce parti passera pour un bolchevik à côté de lui.
Les lodens affectionnent particulièrement la messe dominicale, qui est un peu leur soviet hebdomadaire. Ils affectionnent aussi certaines villes ou quartiers réservés, Neuilly-sur-Seine en premier lieu, que l’on peut qualifier sans trop d’exagération de kolkhozes lodeniques.