Fillon refuse de me serrer la main, mais serre celle de Salih Farhoud, l'ex-recteur de la mosquée de Stains, dont le ministère de l'Intérieur expliquait qu'il s'agissait d'un "repère de djihadistes".Est-à dire que la politicienne considère ce lieu comme un phare pour de potentiels terroristes? Un repère, dans ce cas? Non, forcément non. Dans le contexte, il est évident qu'elle parle d'un lieu où les djihadistes sont chez eux, dans leur repaire, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. La confusion se fait d'autant plus aisément, et celle-ci est vraisemblablement à mettre au débit des journalistes qui ont transcrit l'entretien (mais lequel? ils sont deux), qu'il n'y a aucune différence à l'oral. Tandis que l'écrit, dans cette langue française pleine de pièges (demandez à Bernard Pivot les souvenirs de ses dictées), marque plus qu'une nuance. Le repaire, selon le Grand Robert (il ne s'agit pas de la dernière édition, mais la valeur de référence reste), est, depuis le milieu du XVIIe siècle, compris dans le sens où voulait l'utiliser Marion Maréchal-Le Pen: "Endroit qui sert de refuge, de lieu de réunion à des individus dangereux." Tandis que, selon le même ouvrage, le repère est "une marque servant à retrouver un emplacement, un endroit." Est-ce clair? Disons que ce le serait tout à fait si repère ne s'était pas écrit repaire du côté des années 1578 (date fournie, cette fois, par le Dictionnaire historique de la langue française) pour des architectes. Non, rien n'est simple...
P.-S. Et même si Bernard Pivot jetait un regard sur la copie avant de lancer l'impression du JDD, il n'aurait rien pu faire cette semaine: il en est absent - la séquence culture se déroule d'ailleurs sans aucune présence de livres.
P.-P.-S. Si, Bernard Pivot est là, mais j'ai été un un cheveu de le manquer, ne goûtant que du bout des lèvres (et avec un cheveu sur la langue?) les suppléments consacrés aux cadeaux des sacro-saintes fêtes de fin d'année.