#energiesolairePar Xavier de La Porte.Publié le 09/12/2016
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Le point de départ, c’est une étude dont je vais vous donner le titre pour vous faire flipper : « Energie photovoltaïque : méta-évaluation de la qualité des études, de leur reproductibilité et de l’harmonisation des résultats ».
Cette étude a été publiée en novembre dernier par des chercheurs du Center for Environnemental Policy de l’Imperial College de Londres, et elle a consisté à examiner près de 29 études qui comparent l’énergie produite par les panneaux photovoltaïques à l’énergie nécessaire pour les construire (l’idée de ces études, c’est de voir si l’énergie solaire est si intéressante que ça du point de vue environnemental).Or, en analysant de manière très précise ces 29 études, en examinant les données qu’elles utilisaient, les technologies auxquelles elles se réfèrent, les chercheurs de l’Imperial College de Londres ont fait un constat assez stupéfiant : ces études utilisent des données en moyenne vieilles de 7 ans, se réfèrent à des technologies qui ont été largement améliorées depuis.
Résultat, elles sous-estiment largement les performances de l’énergie solaire.Car, selon les chercheurs, ce qui s’est passé entre 2009 et aujourd’hui, c’est que les performances de l’énergie solaire ont doublé. Et si l’on fait les mêmes calculs en actualisant les données, en tenant compte des progrès réalisés par les technologies d’aujourd’hui, on s’aperçoit que l’énergie solaire est aussi
performante que le pétrole ou le gaz.Aujourd’hui, le pétrole et le gaz produisent 15 fois l’énergie nécessaire à leur production, un chiffre en baisse régulière du fait des efforts à fournir pour trouver de nouvelles ressources et la qualité de plus en plus médiocre de ces ressources. Le rendement de l’énergie solaire est aujourd’hui entre 14 et 16, et ne cesse d’augmenter avec l’amélioration des technologies.Bref, on est dans une situation assez incroyable où des données obsolètes produisent des résultats qui ne correspondent pas à la réalité. Mais ce sont ces résultats qui servent aux décideurs politiques à définir leur politique énergétique pour les décennies à venir.Ce cas particulier illustre une question fondamentale : l’importance des données en matière environnementale.L’écologie est affaire de mentalité, elle est aussi affaire de chiffres et de calcul. On raisonne à partir de modèles.Le chercheur américain Paul. N. Edwards, du département d’histoire de l’Université de Michigan, mène un
travail passionnant autour de données climatiques et des controverses qu’elles suscitent. Il explique que le rassemblement de données provenant du monde entier est un rêve de la météorologie depuis 1830.Mais ça pose plein de problèmes :
- Comment s’assurer qu’elles sont correctement calibrées les unes par rapport aux autres ?
- Comment s’assurer que les indications des instruments sont les mêmes à Paris, à Dakar et à Johannesburg ?
- Ça c’est le problème géographique, mais il y a le problème temporel tout aussi essentiel en matière climatique : comment comparer les observations de 1880, quand il n’y avait que quelques stations, avec celles d’aujourd’hui ?
- Comment être certain qu’un thermomètre du début du 20ème siècle donne les mêmes mesures qu’un thermomètre d’aujourd’hui ?
Et Paul. N Edwards fait l’histoire de ces données climatiques, en lien avec les technologies qui – depuis le télégraphe jusqu’à l’ordinateur – permettent non seulement de les recueillir, mais aussi de les rassembler et de les travailler.Les capteurs se sont multipliés, les ordinateurs peuvent produire des modèles, des simulations. Mais ça ajoute des degrés de complexité. Parce que les données fournies par un satellite, par exemple, sont très difficiles à interpréter : ils enregistrent le rayonnement d’un vaste volume d’atmosphère, mais sans contact avec l’air comme les thermomètres traditionnels, donc il faut transformer ces données par des calculs algorithmiques pour obtenir des données climatiques utilisables...Ce travail sur le données est nécessaire, mais il peut donner l’impression, de l’extérieur (et en particulier pour les plus sceptiques), qu’il y a manipulation. Ainsi, paradoxalement, l’informatique et les technologiques augmentent-ils l’intensité de qu’Edwards appelle la « guerre des données ».Mais Internet pourrait jouer un rôle positif dans cette guerre : en rendant publiques les données, en montrant comment elles sont obtenues, travaillées par les algorithmes, comment les modèles sont construits, il peut aussi dissiper des doutes quant à d’éventuelles manipulations, et participer à l’apparition d’un consensus. Encore faut-il tirer les conséquences de ce consensus. Mais là, c’est une autre question…
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