FH, de Laurent Cennamo

Publié le 09 décembre 2016 par Francisrichard @francisrichard

FH est le titre donné au recueil de poésie de Laurent Cennamo. Pour faire plus court, il aurait fallu ne lui donner pour titre qu'une lettre de l'alphabet, mais laquelle? Ce titre court est bien choisi. Car, F, c'est pour Fiat et H, pour Hitachi, et il sera facile de retenir cet acronyme.

FH est le titre de la première des trois parties qui composent le livre, un petit livre par le nombre de pages, un grand livre par tout ce qu'il évoque: La poésie résume et agrandit, écrit le poète. Et c'est bien de cela qu'il s'agit: de résumer et d'agrandir.

FH, ce sont les initiales de la marque d'une pelle mécanique. Ces deux lettres la résument, Laurent Cennamo l'agrandit. La pelle mécanique FH ("Fiat et Hitachi") creuse le poème, elle est de cristal, vieillard peignant un enfant, chaton de saule, nid, guide souple et tendre...

La deuxième partie est dédiée A un joueur du FC Bâle. Les maillots rouges et bleus du club sont comme les tuniques des chevaliers du Moyen-Âge et le footballeur court, glisse plutôt, sa chevelure en flamme très haut dans le ciel pervenche: un rouge sur bleu, qui le résume.

Ce joueur a la peau rouge d'un Indien, les chevilles plus pures que celles des anges peints par Piero della Francesca. Et le poète visualise les fils rouges emmêlés qui pendent du coussin bleu foncé, en bas à gauche de La Dentellière de Vermeer au Louvre. Autant de rouges sur bleu qui l'agrandissent.

La troisième partie s'intitule La neige au-dessus des mots: L'écriture ne remplit jamais - il faut déjà être plein, dit-il. Quand il la compare à la peinture, c'est pour dire qu'écrire éloigne tandis que peindre nécessite d'être proche, le plus possible, tandis que la poésie serait la relecture d'une ligne que l'on vient à peine de finir d'écrire...

Laurent Cennamo se nourrit de poésie - d'Alberto Nessi ou de Christine Lavant -, de peinture -  des primitifs italiens, de Giotto, de Konrad Witz ou de Giorgio Morandi -, et de paysages de montagnes - du Petit Salève (colombe renversée sur la table basse des corbeaux) et de la chaîne du Jura enneigé:

quelques os

posés dans l'air, la lumière, légers,

comme absents - emballés dans du papier de soie

noire par des mains que n'usent plus le temps.

Deux phrases me parlent:

La peau est la cerise sur le gâteau d'os

Être exilé, ce n'est pas se retourner (sur son passé, son pays, son amour), c'est voir le monde se retourner et ne plus nous voir

Ces deux phrases n'ont pas de point final, et j'aime qu'elles demeurent ainsi, en quelque sorte ouvertes...

Francis Richard

FH, Laurent Cennamo, 80 pages, Samizdat