Nihilisme. C'est le reproche que font des Camus, Proudhon, Arendt ou Dostoïevski à ce que, faute de mieux, on pourrait nommer "gauche bourgeoise", Marx, Sartre, la pensée 68, les intellectuels qui ne sont pas venus du peuple, ou qui n'ont pas été fidèles à leurs racines. Le nihilisme est l'antinomie d'autorité. C'est penser que la fin, l'atteinte d'un utopique idéal, justifie tous les moyens. La Terreur en particulier. Cette fin peut être le néant. Détruisons la société, le mal, elle se renouvellera miraculeusement. C'est ce que dit Heidegger, qu'ont beaucoup aimé nos intellectuels.
Mais les nihilistes sont-ils vraiment nihilistes ? Les casseurs de 68 sont à l'Académie française, dans les palais de la République, ou à la tête de nos grandes entreprises. Le nihiliste ne veut pas détruire la société. Il la trouve très bien. A condition d'en profiter. Ce qu'il nie ce n'est pas l'Autorité, mais celle de ses parents. Cependant, il n'a pas compris qu'en attaquant la seconde, il faisait tomber la première. Et il se trouve bien dépourvu quand il constate qu'en créant l'anarchie, il a sapé sa propre autorité.
L'intellectuel a été le vecteur du néant. C'est maintenant à la société de reconstruire une histoire qui ait du sens pour elle. Logiquement, l'intellectuel devrait trouver sa justification dans ce travail. Sera-t-il capable de faire sa révolution culturelle ?