Ici et là, dans ma pratique comme sur les réseaux sociaux, je vois beaucoup d'incompréhensions sur ce qu'est le renforcement positif. Pourtant, c'est un ingrédient essentiel pour élever des enfants épanouis, qui deviendront des adultes épanouis.
Le renforcement positif, qu'est-ce que c'est ?
Ce terme vient de la psychologie béhavioriste : il s'agit d'un stimulus agréable qui vient renforcer un comportement et encourager sa reproduction, dans un processus de conditionnement. L'expérience du chien de Pavlov en est un bon exemple. Mais les enfants ne sont pas des chiens, et aujourd'hui, on ne pense plus guère à les conditionner, sauf dans le cadre de certaines thérapies adaptées par exemple aux troubles du spectre autistique (méthode ABA).
Quand on parle de renforcement positif, pour les autres enfants, on devrait plutôt parler de signes de reconnaissance positifs, ou " strokes positifs ".
Le stroke positif, un besoin vital, et facile à satisfaire
Les êtres humains ont un besoin vital de signes de reconnaissance. Ces signes de reconnaissance peuvent être positifs ou négatifs.
En termes d'énergie psychique reçue, 1 stroke positif vaut 10 strokes négatifs.
Cela explique que si un humain ne reçoit pas de strokes positifs, il va chercher à multiplier les strokes négatifs (réprimandes, signes d'exaspération, punitions ...) pour compenser. Ce qui génère des comportements agressifs et provocateurs, et induit un cercle vicieux : l'enfant ou le jeune qui " cherche " son entourage familial ou scolaire sait très bien le trouver en mode " provocation ", et les retours négatifs qu'ils reçoit sont un encouragement à continuer. Mieux vaut des strokes négatifs que pas de strokes du tout !
Pourtant, les strokes positifs sont une ressource gratuite, inépuisable, et à la porte de tous. En plus de favoriser les comportements positifs, ils nourrissent l'estime de soi et la confiance en soi.
Qu'est-ce qu'un bon stroke positif ?
Un bon stroke positif est :
Il passe bien sûr par la parole, mais aussi par le regard et le toucher.
Le stroke positif peut être lié à une action, une réalisation, un effort, ... ou aux qualités de la personne. Les deux sont importants.
Il existe aussi des strokes négatifs : si ceux qui sont liés à une action ou un comportement peuvent s'avérer utiles (mais déconnectés des strokes positifs), ceux liés à la personne (" Tu es stupide ! ", " Quelle paresseuse ! ", " On ne peut vraiment pas compter sur toi ! ") sont à éviter absolument.Quand les strokes positifs posent problème
Souvent, quand les signes de reconnaissance positifs posent problème, c'est que les parents ne sont eux-mêmes pas très à l'aise avec les compliments. Et ce n'est pas leur faute : ils ont acquis, par leur éducation ou leur expérience de vie, des réflexes dont ils sont les premières victimes, et ne peuvent pas transmettre un rapport sain aux compliments. Heureusement, ça se travaille !
" C'est juste normal, on ne va pas le féliciter alors qu'il n'a rien fait d'exceptionnel ! "
Les parents qui développent ce type de discours sont souvent des perfectionnistes, prompts à voir chez eux-mêmes, et chez les autres, le petit détail qui ne va pas. Si une réalisation n'est pas parfaite, elle ne vaut pas grand-chose. Seules les grandes réalisations méritent des compliments. Les efforts, eux-mêmes, sont normaux, et si ne pas en faire est condamnable, seuls ceux couronnés d'un succès indiscutable méritent la reconnaissance, et le renforcement positif. Certes, cela peut avoir des effets bénéfiques sur la réussite scolaire et professionnelle, car en (se) fixant des objectifs élevés, on a plus de chances de les atteindre. Cependant, le danger est réel : les drivers " sois parfait ", " sois fort ", " fais des efforts " deviennent surdéveloppés, et peuvent induire des risques élevés de perfectionnisme et de .
" Tu es le plus beau, le plus grand, le plus fort ! "
D'autres parents, comprenant mal ce qu'est le renforcement positif, ignorent ou oublient qu' un vrai stroke positif est adapté, dosé, argumenté et personnalisé. Ainsi, ils vont abreuver leurs enfants de discours positifs exagérés sur leur être ou leurs réalisations. Que se passe-t-il alors pour ces enfants ? Ils apprennent à déconnecter ce qu'ils font de ce qu'ils reçoivent comme retour sur leurs réalisations. Ils peuvent aussi développer un complexe de l'imposteur, qui est en soi très inconfortable, et peut lui aussi pousser au burn out. Et leur estime de soi - basée sur une bonne connaissance de soi, de ses points forts et de ses points faibles - n'en sera pas renforcée.
" Méfie-toi de ceux qui te font des compliments ... c'est toujours intéressé "
C'est vrai, certains manipulateurs peuvent faire des compliments non sincères et intéressés. Pour autant, ça ne concerne qu'une minorité des compliments que l'on reçoit. Et on prend moins de risque à les recevoir avec naïveté, qu'à refuser tous les compliments par méfiance ! Car alors, vous transformez les strokes positifs en strokes négatifs, et vous découragez ceux qui vous complimentent sincèrement de le faire. C'est comme si vous refusiez un cadeau. Assez grossier, n'est-ce pas ?
Si VOUS êtes à l'aise pour recevoir des compliments, alors vous montrerez l'exemple à vos enfants, et vous hésiterez moins à en faire.
Apprenez à répondre d'un simple " merci " souriant à qui vous complimente, sans minimiser vos mérites, sans renvoyer immédiatement le compliment comme pour vous en débarrasser. Cela demande des efforts au début. Mais vous verrez qu'à l'usage, ça fait beaucoup de bien. Et vous donnerez un exemple précieux à votre enfant, et avec cet exemple, la capacité à recevoir ces strokes positifs, si bons pour sa construction !