« Nous y arriverons » le slogan victorieux d'Angela Merkel qui gagne à être connue

Publié le 07 décembre 2016 par Gezale

Angela Merkel et François Hollande à Minsk. (DR)

Réélueavec 88 % des voix des membres du congrès de la CDU-CSU, hier, à Berlin, Angela Merkel demeure la favorite pour occuper le poste de chancelière de la RFA pour la 4e fois de suite. Il était d’autant plus intéressant de mieux connaître la vie et l’œuvre d’Angela Merkel, hier soir sur la chaine Arte. Ce fut pour beaucoup d'entre nous, j'imagine, la découverte d’une personnalité littéralement extraordinaire. Si la chancelière de la République fédérale d’Allemagne semble si importante dans l’Europe et dans le monde d’aujourd’hui, c’est évidemment dû à une conjugaison de facteurs multiples mais le caractère bien trempé de Mme Merkel ainsi que ses facultés d’écoute et d’anticipation ne sont pas pour rien dans la confiance que lui accorde le peuple allemand.
Le documentaire d’Arte retrace la vie de l’exceptionnelle étudiante en physique, fille de pasteur, dans l’Allemagne de l’Est d’avant la chute du mur. Une Allemagne communiste avec un gouvernement sous l’influence du grand frère soviétique et d’une police secrète intrusive autant que redoutée. Angela Merkel est alors une jeune fille enjouée, déjà très volontaire et dotée de talents évidents : intelligence vive, sens du travail et de l’organisation, charisme discret mais ravageur servi par une volonté de réussite apte à surmonter tous les obstacles. Dans cette Allemagne du bloc de l’est, soumise à Moscou donc, la jeune Angela se montre capable de résister au rouleau compresseur de la pensée unique. Cela ne l’empêche pas de briller dans ses études : doctorat en sciences physiques, lauréate en langue russe qu’elle parle couramment et, également, engagement progressif dans la vie politique, lequel va lui permettre de digérer rapidement la réunification qu’elle saisit à bras le corps.
Elle choisit alors la CDU-CSU d’Helmut Khol, qui de mentor et de protecteur, va devenir celui par qui le scandale arrive (l’affaire des caisses noires) avant qu’Angela décide (un vrai coup de poker) de le sacrifier et de postuler pour les premiers rôles. Ce sera difficile tant les hommes au pouvoir vont s’efforcer de réduire cette jeune ambitieuse aux fonctions subalternes de collaboratrice. Il en faudra plus pour mettre à bas les ambitions de celle qui, fruit de hasards et de sens politique aigu, domine la politique allemande et européenne depuis une décennie.
Les témoignages sont éloquents : souvent positifs, ils sont tout de même réservés lorsqu’il s’agit qualifier les sentiments de celle qu’on appelle «Mutti» dans l’Allemagne d’aujourd’hui. Est-elle calculatrice, fausse naïve, intrigante ? Ou au contraire, sait-elle se faire mutique pour mieux encaisser les coups, moins s’exposer, mieux préparer ses stratégies ? A la Commission de Bruxelles, on connaît l’autorité d’Angela Merkel, on sait aussi qu’elle s’appuie sur un pays industriel fort, aux excédents commerciaux importants, aux déficits réduits et au taux de chômage très inférieur au taux français par exemple.
S’agissant de l’accueil des réfugiés, on ne peut que louer le caractère humaniste de la chancelière et une sincérité évidente face au malheur des dizaines de milliers de malheureux. La France n’est pas arrivée à la cheville de l’Allemagne. Il subsiste pourtant quelques taches sur le blason de Mme Merkel : un retard à allumage important lors de la crise financière de 2008, une lente incompréhension de la situation grecque et plus largement de la spécificité européenne, enfin et surtout, un leadership dans le monde conservateur bien qu’ayant réalisé une coalition avec les sociaux-démocrates du SPD.
Après 10 ans de pouvoir, Mme Merkel fatigue. Si son envie de réussir demeure intacte, elle est tout de même contrainte de s’adapter à un monde globalisé avec Poutine, Trump, Xi Jinping, Erdogan…et des démocraties fortement attaquées par les extrêmes. En tout état de cause, le portrait dressé sur Arte laisse poindre une personnalité solide dont le slogan « nous y arriverons » a été mis en application de manière telle qu’il fait bien des jaloux en Europe…et en France.