Éditions du Bailli de Suffren, 650 pages, 59 euros.
Pour notre plus grand bonheur, personne ne s’étonnera que le préfacier s’appelle Thierry Frémaux. «Le sport au cinéma est un mélange singulier d’hybridation sociale et d’invention romanesque», écrit le directeur de l’Institut Lumière (à Lyon) et délégué général du Festival de Cannes. Cet amoureux fou de la geste sportive et de toutes ses déclinaisons, à l’écran comme en littérature, ajoute opportunément: «Né le premier –et sans remonter aux Grecs–, le sport, territoire infini de récits épiques sans scénarios prévisibles, a été investi d’emblée par le cinéma. En 1896, le Cinématographe de Louis Lumière est allé filmer la boxe, le cyclisme, le football, la gymnastique et la montagne. (…) Ludique, technique, encyclopédique, élégant, ce beau livre se veut réconciliation de deux publics que les coutumes et les cultures “à la française” ont trop souvent séparés.»
La pellicule fut donc un point de jonction bien plus vaste et plus prolixe qu’on ne l’imagine. Un immense territoire que personne, jusqu’alors, n’avait inventorié. Car les caméras se sont non seulement braquées sur la boxe, l’athlé-tisme, le foot ou l’automobile –ses champs de prédilection–, mais aussi sur le bobsleigh, le curling, les échecs, le bodybuilding, le cricket, la pétanque, autant d’expériences mues par des condensés intenses d’humanité, souvent contradictoires. Si le cinéma substitue à nos regards un monde qui s’accorde à nos désirs, le sport, lui aussi, nous raconte tout, le conflit, la solidarité, le dépassement de soi, l’effort, l’argent, l’amour, la gloire, l’humilité, etc. Avec pour fonctions essentielles l’émotion et la catharsis. En toute logique, sport et cinéma vont de pair. Même si certains pensent que l’un précède l’autre, comme ce sacré Ken Loach: «Le football est plus important que le cinéma.»
[ARTICLE publié dans l’Humanité du 1er décembre 2016.]