"Je suis la fille du juge Boulouque, du terrorisme, des années 80, des attentats parisiens. Et je suis orpheline de tout cela. Personne ne se souvient de mon père et la vague d'attentats des années 80 à Paris se confond avec celles qui ont suivi. C'est après tout le destin des vagues de se retirer. C'était aussi le sien. J'avais 13 ans lorsque mon père a tiré, le 13 décembre 1990. Tiré sur lui, cette nuit-là. Et sur nos vies."
Juge anti-terroriste à partir de 1985, suite à l'attentat devant le magasin Tati, rue de Rennes à Paris, le père de Clémence Boulouque fit régulièrement la une des journaux jusqu'à son suicide. Le film "La fille du juge" reprend les mots de Clémence sur fond d'images d'archives privées et médiatiques pour raconter la petite et la grande histoire, ou comment les affaires publiques peuvent avoir des conséquences dramatiques sur une famille. On y voit en quelque sorte l'envers du décor des affaires politico-judiciaires, la manière dont elles rejaillissent sur les proches et bouleversent une enfance.
"La fille du juge" est d'abord l'autobiographie pudique d'une jeune fille devenue fem
Mais le film est aussi la tentative de donner une place dans la mémoire collective à son père déjà oublié de tous, qui eut "le destin de tous ceux qui font l'actualité mais ne marquent pas l'Histoire." La mémoire d'un homme meurtri et isolé dans l'exercice de ses fonc
Sa fille grandit à l'écart, différente, essuyant les réflexions des camarades de classe, avec ses cauchemars et ses angoisses, ses nounous à revolver, la veilleuse allumée la nuit pour vaincre les démons, malgré les tentatives de ses parents de maintenir un semblant de normalité, de cacher leur peur et leur détresse, et de marcher la tête haute pour sauvegarder leur dignité.
"La fille du juge" est un superbe film sur la perte. La séparation brutale, définitive, sans une lettre d'explication, une balle tirée dans la bouc
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Depuis quelques années, nombreux sont les films documentaires de trentenaires qui reviennent sur leur histoire familiale. Même si "La fille du juge" n'est pas réalisé par Clémence Boulouque elle-même, le film s'inscrit dans un courant documentaire actuel fort, et étroitement lié à une génération (il n'est pas impossible d'ailleurs qu'un Vincent Delerm en soit le pendant musical). Il serait probablement très intéressant d'en analyser les fondements, il me semble que cette éclosion dit quelque chose de profond sur ce que nous sommes, nous, nés après 68, fils et filles de baby-boomers. J'ai chroniqué sur mon blog un autre film qui entre dans ce courant, "Mon père le Turc": http://lemeilleurdesmondes.blogs.courrierinternational.com/archive/2007/08/29/cinéma-à-la-première-personne.html Mais j'ai bien d'autres exemples en tête, et ceux qui suivent attentivement les programmes d'Arte ou fréquentent les festivals de ciné documentaire voient probablement de quoi je veux parler.
La même semaine,
Le film se présente comme une enquête, donnant la parole aux survivants, voisins, amis, membres de la famille et s'appuyant sur des films familiaux et les toiles du peintre, mort à la porte de la gloire, quand une galerie new-yorkaise lui proposait d'exposer ses toiles. Georg rencontra sa femme alors qu'elle était déjà mariée à un universitaire, ils se marièrent et décidèrent d'aller jusqu'au bout de leur rêve: s'installer dans une grande maison toscane et vivre de la peinture et des activités agricoles. C'était les an
Caterina ne cherche pas à régler ses comptes, ni avec son père, ni avec sa mère, mais à comprendre comment l'utopie a pu virer au cauchemar, l'idylle en illusion. Elle revient avec intelligence et mesure sur les années 70 et leurs promesses. Comme Clémence Boulouque, elle rappelle à la mémoire de tous qui fut son père, dont elle renoue avec l'oeuvre inachevée, longtemps restée muette pour elle, sa manière à lui de lutter contre les démons du passé en opposant ses couleurs vives à l'horreur infligée à ses proches, dont il refusait catégoriquement de parler. "Je peins pour me libérer de moi-même, pour me débarasser des histoires, des visions, des fantasmes et des traumatismes, de tout ce qui est en moi", écrivait-il dans son journal.
Sa fille affronte le passé qu'il éludait à sa place, en quelque sorte, à travers ce film. Un travail de mémoire pour reconstituer son histoire personnelle et vivre en paix avec les siens.
Plus d'infos sur Georg Klusemann et le film de Caterina: http://www.georgklusemann.org/