Cette fois j'étais à la caisse. Il fallait un billet pour entrer en salle, abonnement annuel ou pas. Billet donné par moi.
Heureusement ce n'était pas encore la folie des téléphones.
C'était pointu, mais tout le monde comprenait et acceptait les règles. Comme, plus souvent qu'autrement, les clients fonctionnaient par abonnements annuels, ne payait qu'une seule fois par année, et pour tout, toute l'année, il aurait été facile de faire preuve d'indiscipline et de se pointer n'importe quand, pour en sortir n'importe quand, et ainsi déranger tout ce public pointilleux. Quand on ne paie pas, voir 15 minutes, ne pas aimer et quitter, c'est facile. On a rien payé. Mais non. Ça, on en voulait pas. C'était une mesure de prévention de comportement.
Nous voulions aussi éviter que des gens aillent voir, en période de festival souvent, un film ailleurs et choisissent de venir voir la suite d'un autre film en cours à la cinémathèque. (pas grave, ça me coûte rien, je paie à l'année!) Une double porte nous donnait la chance, de la salle, de filtrer ceux qui tentaient de s'introduire trop tard.
Et de les refouler. Ce qui était rare. La règle était connue et respectée.
C'était de plus, une règle avec laquelle elle aurait dû être familière car son chum et elle étaient tous deux membres du Conseil Administratif de la Cinémathèque. Mais ça, l'usager s'en moque quand il entend quelqu'un faire du bruit pendant son Fassbinder ou son Fellini. Il n'est que dérangé.
Pendant que j'argumentais avec elle, pas un, ni deux, mais bien trois autres collègues, sont venus à ma rescousse quand elle menaçait de prendre feu et de se plaindre au pape, et ils m'ont aussi défendu. Elle est devenue une enfant quand elle a commencé à traiter l'un d'entre nous (qui arborait une petite barbe) de chèvre. On lui a tous laissé nos noms pour qu'elle se plaigne au bon endroit et comme elle le souhaitait.
Nous ne faisions qu'appliquer une règle dûment votée par les membres eux-mêmes, qui étaient les vrais propriétaires de la Cinémathèque. C'était leurs abonnements (et quelques subventions gouvernementales)qui faisaient vivre l'endroit. Nous ne pouvions la laisser briser une règle soigneusement construite contre son exact mauvais réflexe du moment. Une règle extrêmement respectée (et comprise) du temps que j'y étais.
Le lendemain, son chum et elle faisaient dérailler la réunion prévue au C.A. en la faisant annuler par représailles. Nos patrons sont venus nous voir et, même si on les sentait un peu ébranlés, ils nous ont donné raison. Cette reine abeille avait tort. Fallait pas se laisser piquer.
Cette personnalité est connue comme drama queen dans le milieu, mais comme "héroïque" en public.
C'était écrit partout, compris par tous, souhaité par la plupart. La cinémathèque avait un snobisme assumé et ceux qui n'y comprenaient pas les règles devaient se loger sous d'autres parapluies.
Ce n'était pas une interprétation de la règle, c'était tout simplement la règle et elle incarnait, par A+B le pourquoi de l'invention de cette règle.
C'était de la petite petite politique, dans une petite petite vie.
Plusieurs vivent de l'espoir que le Collège Électoral ne confirme pas la présidence de Donald Trump, qui a tout de même plus de 2 millions de vote de moins que sa rivale Hillary Clinton. Ceci veut dire que plus de 66 millions de voteurs aux États-Unis ne voulaient pas de Trump.
Dans la constitution, on a créé le Collège Électoral afin d'éviter que la fonction de Président n'échoie à un individu ne possédant pas les qualifications requises.
Alexander Hamilton a même écrit qu'il fallait éviter qu'un démagogue doué pour "les petites intrigues" ne réussisse à berner la population.
C'est fou ce que tout ça s'applique parfaitement au Président Trump.
Le Collège Électoral n'a jamais renversé le résultat d'un vote, et on ne connait pas le niveau de déstabilisation que cela ferait, si ça arrivait.
Mais on ne connait pas non plus le niveau de déstabilisation que les moineaux actuels provoqueront dans la volière de la Maison-Blanche.
Brouillard et Néant.
Ce ne serait pas une interprétation de la règle de la constitution que de se prononcer contre le résultat final. Ce serait éviter que la présidence échoie à un homme n'ayant pas les qualifications requises. Et ce serait éviter qu'un démagogue ne berne la population avec ses petites intrigues.
7 Grands Électeurs ont déjà confirmé qu'il voteraient contre Trump. Il en faudrait plus de 20 pour qu'il ne dispose plus de la majorité de 270.
Mais tout ça reste vain, puisque la Chambre des Représentants aura le dernier mot alors qu'elle est, en ce moment, à majorité républicaine.
Reste qu'on ne parle pas d'une interprétation vague du 2ème amendement.
C'est comme si la peste disait au docteur:
"écoutez-moi bien docteur, voici ce que vous devriez faire..."
À la mi-décembre, les Grands Électeurs du Collège Électoral, ils sont 538 + 3 du District de Columbia, confirmeront (ou pas) la présidence du bouffon voté.
Et le voilà en zone parfaitement pyschotique en prétendant avoir gagné le vote populaire!
Ce pays a tout pour devenir soudainement petit.