Titre : La Communauté, T1 et T2
Scénaristes : Yann Benoît & Hervé Tanquerelle
Dessinateur : Hervé Tanquerelle
Parution : Mai 2008 – Janvier 2010
« La Communauté » est une bande-dessinée retraçant des entretiens entre Hervé Tanquerelle et son beau-père Yann Benoît. En effet, ce dernier avait participé à la fondation d’une communauté à la suite des évènements de mai 68. Avec ces deux pavés pesant 340 pages, Tanquerelle raconte en détail l’histoire de cette initiative à travers les yeux de Yann, de l’avant 68 jusqu’à la fin de l’aventure. Le premier tome parle des débuts de la communauté jusqu’à son apogée. La deuxième partie traite avant tout des problèmes liés à cette réussite, le quotidien et la chute inévitable.
Un livre d’entretiens très prenant.
Étant un livre d’entretiens, « La communauté » est construit de la même façon. Tanquerelle n’hésite pas à se dessiner en train de parler avec Yann ou sa propre compagne (qui est donc la fille de Yann). La partie narrative est évidemment omniprésente mais elle sait s’effacer au profit du dialogue quand c’est nécessaire (pour les réunions de la communauté par exemple). De même, Tanquerelle n’hésite pas à ajouter des passages complètement irréalistes et finalement poétiques où il se dessine en personnage minuscule venant visiter la communauté comme s’il était une petite souris…
Pour la réussite d’un tel ouvrage, il faut un minimum d’honnêteté. En cela, Yann Benoît se confie réellement. Il essaie de parler avec objectivité de comment tout se passait, sans pudeur. Régulièrement, il rappelle que c’est son propre point de vue et non pas celui de tous les habitants passés de la communauté. Il n’hésite pas à être critique envers lui-même. De même, la compagne de Tanquerelle semble vraiment honnête dans ses propos et ne cherche pas à énoncer une vérité universelle. D’autres points de vue auraient pu être apportés, mais cela semble suffisant ici pour se faire une idée précise.
Je tiens à tirer mon chapeau à Tanquerelle qui a su retranscrire des entretiens très longs avec beaucoup de brio. Il ajoute des parcelles d’humour, parfois de poésie et arrive à rythmer un récit qui par essence même ne l’est pas. Son dessin, noir et blanc et rehaussé de gris, est très agréable. Quelques photographies redessinées apportent un peu d’authenticité et nous rappelle qu’il ne s’agit pas ici d’une fiction ! Tanquerelle, que je ne connaissais pas, prouve ici de grandes qualités de narrateur.
Pour peu que l’on s’intéresse au sujet, « La communauté » est un documentaire passionnant. On se prend au jeu et l’on souhaite que cette communauté survive (même si rapidement, on comprend que ce ne sera pas le cas). Malgré le côté un peu indigeste des ouvrages (340 pages d’entretien !), Tanquerelle parvient à ajouter au lecteur de quoi souffler, respirer un peu avant de continuer une lecture qu’il est souvent difficile à arrêter…