(feuilleton) Cécile Riou, "Phrase unique", 7

Par Florence Trocmé

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(…) aussi vrai que la gourde ne l’est pas tant que ça, aussi vrai que le plat oublié sur le bord de la fenêtre se colore de noir et de vert, en franges ondulantes comme l’ourlet d’une huitre, on peut affirmer que l’on croise le brun et le noisette, la détresse et la vitalité, et que l’ourlet du « chère madame vous prendrez bien un peu plus de Peacock orange » cède et laisse place à un épanchement sans flaque, et que la compassion porte ses fruits, alors vous ne voulez pas être « différent, mais différemment », vous êtes dans le pli du repli, caché, net, indispensable et  iodé(…)
(…) considérons un licou : tu mènes ton cheval, docile, mais pas ton chat, ni ton poisson ; considérons le crottin de cheval : il fait merveille ; de rat il est répugnant ; considérons Gaston Lagaffe : crois-tu que sa mouette le mènerait par le licou, mettons, au travail ? Considérons l’angoisse : tu crois qu’on peut la ligoter ou qu’elle-même ne sait pas assurer le licou autrement à la gorge ; suppose que « le vent qui vient à travers la montagne t’a rendu fou », même s’il rime avec licou ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval, et je gage que le licou, pas plus que l’éperon ou l’étrier ne sont tes accessoires préférés, et que te plait plus le (…)
(…) nom des fleurs : le nom, froissée et fripée, haute pourtant sur sa tige doucement velue, fourrure noire au cœur, tu la connais, les pétales tombés il reste un bijou rêche, semblable à un bouton de porte, sectorisé comme une mappemonde, renfermant une drogue puissante, nom de  fleur, le nom : c’est une anti-Dorine, car la Dorine de mon souvenir est une fidèle franche droite futée servante moliéresque, athlète je ne sais pas, athlète je ne crois pas sinon athlète femme de tête ; nom de fille : le nom Dorine, c’est l’or à feuilles alternées, l’or saxifragile du cresson de rocher, mousse douce dite chrysosplenium  (…)
(…) nom de plante, le nom :  le thym qui ne se prononce pas comme il est écrit, sec il s’effrite en petites miettes qui se glissent partout, frais c’est un arbre miniature aux branches alternées, qui désinfecterait, sans doute aucun au cœur d’une décoction, les plaies marquées à l’épaule, sur la main gauche, sur la main droite, par Guillaume III, successeur de Jacques II , « qui mit beaucoup de bonne volonté à l’écrasement de cette vermine », Hugo veut parler ici, dans L’Homme qui rit, des comprachicos, ce qui nous éloigne beaucoup de l’idée du thym, désinfectant social moins violent que la désinfection royale (…)