éditions Accarias/L’Originel, 2015.
N’ayons pas peur des mots : voici un livre es-sen-tiel ! Joey Lott est l’un de ces auteurs fascinants qui, comme le célèbre Eckhart Tolle, est passé d’une expérience extrême à une autre : de l’Angoisse chronique – seuls ceux qui sont passés par là peuvent comprendre ce que ce substantif recouvre réellement – à la Liberté sans mesure, encore appelée « simplicité d’être ». C’est un livre traduit et bien traduit – on ne s’en aperçoit pas ! – par Philippe de Henning. Le traducteur n’hésite pas – il s’en excuse à la fin- à prendre des libertés avec la sacro-sainte grammaire française, afin de rester au plus près du rythme direct des pages originales, écrites en anglais. Voilà qui contribue à l’efficacité du livre.
Cette libre simplicité intérieure, l’image de la première de couverture nous la suggère à merveille : un immense ciel bleu, une mer limpide à l’horizon infini et le bord d’une terrasse de bois pour y accéder. Le plus naturel et le plus grandiose à la fois. De fait, c’est bien de cela qu’il s’agit dans ce livre : Joey Lott ne passe pas par quatre chemins : inlassablement, il nous prend à partie et nous demande de revenir, nous lecteurs, à cette simplicité d’être que nous ne cessons de fuir par nos pensées inutiles, nos réactions énergivores, nos crispations, nos efforts continuels pour éviter ce qui nous gêne... : « Je suis la capacité infinie à accueillir le tout. Voilà. C’est ainsi. »
L’auteur, sans se lasser, après avoir décrit sans complaisance sa maladie psychique, nous ramène constamment vers ici-maintenant, et d’abord celui qui est le nôtre durant notre lecture : « Notez comment vous maintenez la tension dans votre corps. Portez votre attention sur l’espace de vos yeux. Y trouvez-vous une tension ? Soyez curieux. N’essayez pas de changer quoi que ce soit. Notez simplement ce qui se passe ici, entre vos yeux. » Cela vise très simplement à nous ramener vers « le flux de la vie », c’est-à-dire « tout ce qui est », c’est-à-dire encore la totalité non choisie, non triée, non édulcorée : « Le flux de vie comprend orgasmes et calculs rénaux. Navré de faire voler votre bulle en éclats. Le flux de vie est ce qui est déjà là. C’est seulement le rejet d’une certaine part du flux de vie pour une cause qui cause de malheur. » Tout est dit, dans ces quelques lignes. Rien d’autre à comprendre. C’est cela seul qui est à vivre. L’auteur, avec sa force tranquille et sa franchise, nous permet de faire ce retour vers notre seul but, que celui-ci soit conscient ou inconscient : vivre pleinement, enfin !
Le ton est net, parfois oral, sans aucun inutile ornement. Les phrases sont brèves et incisives. La prose est limpide comme le ciel et la mer. A chaque page il nous est proposé de vivre enfin vraiment. Ce livre est un bain rafraîchissant de vérité, de simplicité, d’expérience vitale : « L’invitation est de tout accueillir tout de suite, en l’instant même – peu importe ce que cela semble être. » Chaque chapitre est précédé d’un titre très simple, parfois oral et prosaïque, parfois d’une simplicité profonde et existentielle. Cela peut donner aussi bien ceci ou ceci : « Les calculs rénaux » ; « C’est comment ? » « Oh là là » ; « Je ne suis pas » ; « Mystère » ; etc. Le titre est suivi d’une citation utile, frappante pour notre mental compliqué : « Ce sont mes principes. Et si vous ne les aimez pas… eh bien, j’en ai d’autres. Groucho Marx. » Chacun des chapitres mêle des considérations de la vie quotidienne et passée de l’auteur (des notations très concrètes et vivantes) à l’enseignement vital qu’il cherche à nous transmettre : « J’ai essayé le LSD pour la première fois quand j’avais dix-neuf ans. Avant cela j’avais été un parangon de vertu et un farouche abstinent de boissons intoxicantes. » Ces contradictions vécues, cet humour sous-jacent, ce va-et-vient continuel entre son passé et son présent, entre son expérience et ce qu’il en retire, sont de nature à nous aider d’une manière très concrète et décisive. A l’heure du fameux Bien-Etre qui partout cherche à imposer ses lettres de noblesse et ses belles leçons, ses trop belles images qui masquent la laideur incontournable de nos existences, à l’ère du Bien-Vivre, du Bonheur qui devrait nous faire oublier les tourments ordinaires, la grisaille des jours d’hiver, la mort et la finitude, à l’heure des grandes supercheries, voici l’instant toujours renouvelé d’un parler vrai, qui nous invite constamment à vivre vrai l’infiniment ouvert : « Simplement soyez honnêtes. » Mais qu’attendons-nous donc pour y plonger, en cet instant de vraie vie, à vivre sans cesse ? Merci, vraiment, Joey Lott. Je le répète : votre livre est essentiel. Vraiment.
En ce qui me concerne, j’ai placé ce livre sur ma table de chevet. Régulièrement, je l’ouvre, à n’importe quelle page. Ca me suffit pour me ramener à ce que je fuis sans cesse… Tout simplement.