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À 6 mois de l'élection présidentielle, le coup de tonnerre Trump vient conforter les précédents propos sur l’impérieuse nécessité de porter attention aux citoyens. Après le Brexit, après la Wallonie, il faut espérer que l'avertissement sera cette fois entendu et que tout en chacun en tirera les leçons collectives et individuelles.
Comme le soulignait avec justesse M. Serres, le temps où des intelligents supposés en imposent à des imbéciles supposés est totalement révolu. Par le biais des observations et commentaires qui nous parviennent, il est aisé de repérer les frustrations et la justesse des analyses.
Ainsi, on peut lire : ce vote est le résultat d'une vulgarité populaire qui s'assume et le rejet d'une élite qui se pare de toutes les vertus. Autre constat, la victoire de Trump est celle d'un positionnement simple, voire simpliste, qui ne s'embarrasse pas d'analyses compliquées, mais touche la cible citoyenne déclassée qui est inquiétée pour elle et pour sa jeunesse, devant les effets de la mondialisation et la montée des différences de toutes natures.
La France, notre France est un beau pays, mère de la Déclaration des droits de l'homme et plus récemment initiatrice de la déclaration universelle des droits de l'humanité (DUDH). Ce beau pays dont le cadre social figure au rang des plus protecteurs au monde, est pourtant en proie à des fractures de plus en plus béantes, liées au Nouveau Monde, aux nouvelles technologies et surtout à la nouvelle donne démographique avec l'allongement de la vie.
Ce dernier constat, souligné avec talent en 2006 par B. Spitz dans "le Papy-Krach" cible sans ambiguïté le citoyen à qui il faut parler et qu'il faut convaincre. Je veux parler de ces jeunes de moins de 35 ans qui avaient cru comprendre que la démocratie c'était le pouvoir du peuple et l'épanouissement individuel de chacun. Nous en sommes très loin et cela conduit aux indifférents de l'abstention et du vote blanc et au réflexe "aventuriste" du vote bête et méchant.
Soyons lucides, le peuple n'a plus aucun pouvoir, car il est confisqué par des politiciens professionnels, organisés en partis et inféodés à des lobbies de toute nature. C'est ce qu'on appelle avec pudeur, la force du marché !
S'agissant de l'épanouissement individuel, il est effectivement recherché, mais nous en sommes loin, avec des générations qui galèrent au chômage ou dans des emplois précaires sans intérêt. Il faut redonner au citoyen un réel espace de libre arbitre. Cela nous conduit donc à poser la question du fonctionnement de notre démocratie et de nos institutions.
Il est évident que c'est la mère de toutes les réformes, mais est-ce le bon moment ? Est-ce avec une telle priorité que se gagnera le scrutin de 2017 ? La victoire de D. Trump aux USA et la position flatteuse du FN prouvent que non. C'est regrettable, mais c'est ainsi. Nécessité fait loi, l'urgence absolue est de parler pratique et pragmatique sur les thèmes au hit-parade des attentes, la sécurité, l'emploi, l'éducation, les solidarités, l'initiative entrepreneuriale et l'Europe.
C'est sans doute sur ces 2 derniers points que le résultat US doit influer sur les propositions 2017. Il faut saisir l'occasion pour qu'une Europe resserrée mutualise sa défense, et au même titre, la même Europe doit s'affranchir du joug des normes comptables et monétaires Anglo-saxonnes.
L'institut Montaigne actualise son étude sur la démocratie, cela est bel et bon. Dimanche soir, sur France 5, E. Morin, d'une incroyable verdeur, entouré de trublions autoproclamés, appelait de ses vœux une remise à plat pour les années à venir.
Sans doute, mais aujourd'hui, il nous faut un plan "B", une réponse pertinente pour afficher clairement des objectifs de transformation sociale de nature à bouger dans le bon sens le quotidien des Français en les dissuadant de l'aventure. Un exemple parmi d'autres, il nous faut affirmer la place du tiers secteur, pour apporter de l'emploi, et un emploi qui emporte avec lui une belle dose d'idéal.
La prise en compte de l'environnement, la lutte contre l'exclusion les solidarités intergénérationnelles ne doivent plus être laissées aux mains d'administrations centralisées. Un vrai projet doit promouvoir une implication citoyenne, hautement démocratique, de tous ceux concernés, pour identifier les problèmes, et y apporter avec justesse les solutions acceptables par le plus grand nombre.
Il est évident que sans démocratie, aucun problème ne peut être durablement résolu. Il faut aussi se persuader que cette construction est par essence très fragile et, on le voit au quotidien, est rapidement dévoyée. Il ne faut donc pas en faire l'alpha et l'oméga d'un projet sociétal.
Elle doit en être un ingrédient majeur, mais il reste à dégager un autre paradigme, en forme de référentiel de valeurs qui donnera envie aux jeunes, aux abstentionnistes, aux "dépités" de s'impliquer, aux côtes d'un nouveau Président, dans une représentation nationale elle-même constituée de citoyens issus de la réalité quotidienne du terrain.