La perspective de la fermeture de deux usines de l'ex-SEITA inquiète à juste
titre les personnes qui y travaillent. Mais la société européenne peut-elle à la fois s'engager contre la consommation du tabac dans les lieux non-privés– après l'avoir encouragée sans souci
pendant des dizaines d'années, smoke is money – et ne pas assumer toutes les conséquences de cette évidence économique : réduire la consommation implique de réduire la production
de
matière première et celle de produits finis.
Toutefois, on ne jette pas un travailleur comme on abandonne un mégot...Ou alors, ça se consume, et ça enflamme.
Je me suis posé la même question lorsque, consultant, j'ai travaillé de manière éphémère pour le compte d'une entreprise d'armements dont les produits phares étaient des engins du genre mine
anti-personnel et bombes à fragmentation. La mission consistait à identifier les raisons du malaise du personnel...La moitié d'entre eux vivaient dans un état de double contrainte
infiniment plus pernicieux que celui du héros de l'historiette des deux chemises : dénoncer dans sa vie extra-professionnelle les produits issus de son activité professionnelle, autrement dit
être en permanence déchiré entre deux motivations de sécurité très puissantes.
Toutefois, on ne laisse pas tomber un collaborateur comme on largue une munition...Ou alors, ça explose, et ça fait mal.
Crédits :
Merci, pour cette composition, à Richard, cité par SoAnn, qui nous dit : Il a pris cette photo à San Martin d’Empuries, en Espagne, le 17 avril 2007. Et inspiré par l’explosion de son
chargeur de batterie d’appareil photo (!), il l’a appelée ce qui nous consume en l’accompagnant d’un texte très vrai.
Merci à la manufacture Tabacofina Vander Elst qui a roulé cette Belga, et au geste artistique du
fumeur – l'absence de maculation par un rouge à lèvres encourage cette inférence – anonyme dont le mégot est tombé avec l'angle voulu à la distance convenable de l'intersection de deux joints de
pavage.
Merci à Sant Martí d'Empúries pour le choix judicieux de ses pavages.