Le 19 août 1839, l'Académie des sciences de Paris rend public le procédé photographique acquis de ses inventeurs par l'État. C'est par cette phrase que commence le texte de Charles-Henri Favrod en introduction au recueil de photographies collectionnées et légendées par lui sur le thème du Vaste monde.
La plupart de ces photographies datent justement du XIXe siècle. A l'époque, comme le rappelle Edith Bianchi dans sa préface, le matériel était volumineux et fragile. Il n'est donc pas étonnant qu'elles aient toutes un air de famille, même si ce sont des images capturées par des photographes bien différents les uns des autres.
Cet air de famille se retrouve en effet dans la mise en scène, évidente dans plusieurs de ces images, la disposition frontale, les éléments de décor, le cadrage choisis. Comme Charles-Henri a inséré quelques-uns de ses instantanés, pris en Afrique ou en Asie au début des années 1950, le contraste est patent avec ceux de ses prédécesseurs.
Comme aujourd'hui l'on passe davantage de temps à voir des images qu'à lire des mots, on ne peut donc qu'apprécier la citation que Favrod fait d'un Théophile Gautier visionnaire, même s'il parle plus haut, de manière déjà datée, de daguerréotype: Notre siècle affairé n'a pas toujours le temps de lire, mais il a toujours le temps de voir.
Les photos de ce livre d'images permettent de voyager dans le temps et dans l'espace, surtout en Asie, en Océanie, aux Antilles et en Afrique. Elles représentent la condition humaine: des portraits d'hommes et de femmes faisant la pose, se livrant à un labeur ou prenant du loisir, mais aussi quelques scènes d'esclavage, de torture et, même, un supplicié.
Depuis son apparition, la photographie a changé le regard des hommes, qui demeurait jusque-là quelque peu approximatif. L'expression vaste monde conduit au terme exotisme, qui, tiré du grec tardif, évoque ce qui est extérieur, étranger. Aussi l'auteur, s'agissant de la photographie, singulièrement en la matière choisie, peut-il la définir en un mot à la fin de son texte:
La photographie est ce qui permet enfin de voir autrement
Francis Richard
Le Vaste Monde, Charles-Henri Favrod, 128 pages Bernard Campiche Éditeur
Un livre précédent chez le même éditeur:
Le Raid américain (2014)