Ainsi la distance qui se maintiendra toujours entre les brutes et les demoiselles qui peuplent le monde vient non pas de l'évaluation respective des forces, parce qu'alors, le monde se diviserait très simplement entre les brutes et les demoiselles, toute brute se jetterait sur chaque demoiselle et le monde serait simple ; mais ce qui maintient la brute, et la maintiendra encore pour des éternités, à distance de la demoiselle, c'est le mystère infini et l'infinie étrangeté des armes, comme ces petites bombes qu'elles portent dans leur sac à main, dont elle projette le liquide dans les yeux des brutes pour les faire pleurer, et l'on voit brusquement les brutes pleurer devant les demoiselles, toutes dignité anéantie, ni homme, ni animal, devenir rien, que les larmes de honte dans la terre d'un champ.
C'est pourquoi brutes et demoiselles se craignent et se méfient tout autant, parce qu'on inflige que les souffrances que l'on peut soi-même supporter, et que l'on ne craint que les souffrances qu'on n'est pas soi-même capable d'infliger.