De retour d'un voyage de plusieurs mois aux Etats-Unis et au Japon, le démographe et historien Emmanuel Todd s'entretient pendant 30 mn avec France Culture et analyse les profondeurs, contours et complexités de l'Amérique de Donald Trump... à mille lieux des visions simplistes, binaires et manichéennes couramment projetées par les médias et sur les réseaux sociaux.
" Il y a deux enjeux : une Amérique qui aspire à une sorte de recentrage national et démocratique, et à un rôle moindre dans les rapports internationaux ; et une Amérique du néolibéralisme et de la globalisation qui domine jusque-là [...] La source de la montée des inégalités dans le monde occidental vient de cette nouvelle stratification éducative [...] Le monde anglo-américain est en train d'accoucher d'un deuxième renversement exigeant plus de régulation, plus d'Etat...et ce, même si Hillary Clinton gagne. Il y a déjà sous Obama un début de recentrage national, de retrait du monde en termes diplomatiques. "
" On ne peut pas raisonnablement soutenir que la Russie soit une menace pour le monde vu la taille de sa population [...] Ce qui est intéressant, ce n'est pas la Russie en elle-même mais le fantasme américain de la Russie. Que nous disent le Pentagone, les démocrates et Hillary Clinton quant ils sont obsédés par la Russie et Poutine ? En fait, ce qu'ils nous disent, c'est : " nous ne pensons que militaire et interventions militaires. Et tant que la Russie est là, on ne peut pas faire ce qu'on veut dans le monde" [...] L'obsession de la Russie révèle que Hillary Clinton et ses petits camarades sont toujours dans une stratégie impériale et que le bien-être interne des Etats-Unis n'est pas leur objectif prioritaire. "
L'essayiste n'hésite pas à lâcher de temps à autre quelques phrases assassines sur l'évolution politique de la France : " On a un peu l'impression que le système politique joue à provoquer les Français [...] Les responsables politiques jouent avec l'électorat parce qu'ils pensent au fond que l'électorat n'est pas capable, pour des raisons sans doute, de voter Front National. Mais c'est un jeu dangereux. "