Sorti mercredi dans les salles, Snowden marque le grand retour de Oliver Stone (Platoon, Né un 4 Juillet, JFK, Wall Street…) au cinéma, quelques années après le jouissif Savages. Comme son nom l’indique, le film s’intéresse à Edward Snowden (Joseph Gordon-Levitt), patriote idéaliste et enthousiaste ayant successivement travaillé pour la CIA et la NSA. Choqué par la découverte de la surveillance de masse orchestrée par le gouvernement américain, il décide de rassembler des preuves et de tout divulguer, dénonçant par là le plus grand scandale d’espionnage de l’histoire des États-Unis.
Si le réalisateur américain Oliver Stone n’a jamais hésité, dans son cinéma, à remettre en question les décisions/actions de son pays, aussi nobles ou discutables soient-elles, il se montre tout de même un peu moins incisif dans Snowden, préférant se concentrer sur l’histoire de l’homme plutôt que sur la complexité de l’affaire. Un choix toutefois judicieux dans l’optique de rendre accessible au plus grand nombre une histoire extrêmement dense. D’autant plus que si le scénario manque parfois de contrepoint pour susciter une véritable réflexion, il offre quand même un regard pertinent sur le parcours de Snowden. En cela, le long-métrage se révèle particulièrement intéressant puisqu’il dresse non seulement le portrait d’un génie, mais il fait également la lumière sur un univers obscur pour la plupart des gens. A travers une romance atypique, aussi mièvre au départ qu’intense à la fin, il montre aussi l’évolution d’un homme constamment tiraillé entre son patriotisme et son humanité. Il en ressort un récit, certes un peu moins riche qu’on pouvait l’espérer, mais néanmoins tout à fait solide, pouvant de surcroît s’appuyer sur une narration fluide alternant brillamment moments présents et flashbacks.
Fondamentalement linéaire, l’histoire compense son relatif manque de profondeur par une contextualisation permanente (11 septembre, Obama…) et une vulgarisation du fonctionnement des différentes entités. Du coup, ce que le film perd en pertinence, il le regagne en pédagogie. Un moindre mal donc. Côté casting, Joseph Gordon-Levitt trouve assurément ici l’un de ses plus beaux rôles. Impliqué, l’acteur campe un Edward Snowden plus vrai que nature. Il est tellement charismatique que le reste de la superbe distribution – Shailene Woodley, Zachary Quinto, Nicolas Cage, Melissa Leo, Tom Wilkinson – a tendance à faire de la figuration. A vrai dire, seul l’étonnant Rhys Ifans, impressionnant d’authenticité dans la peau du mentor de Snowden, offre une belle opposition à l’analyste. On retiendra notamment cette scène intense entre les deux hommes par écran interposé. Enfin, d’un point de vue purement technique, le long-métrage fait également des merveilles puisque si la mise en scène de Stone est somme toute assez classique, mais élégante, la photographie de Anthony Dod Mantle est en revanche somptueuse. Idem pour la BO de Craig Armstrong, discrète à première vue mais puissante quand il le faut.
Pour conclure, si Snowden n’atteint jamais le niveau de complexité qu’il mérite (mieux vaut chercher du côté du documentaire Citizenfour pour ça), il n’en reste pas moins un formidable biopic, brossant avec élégance le portrait d’un homme tiraillé entre son patriotisme et son humanité. Emmené par un Joseph Gordon-Levitt impliqué, le film fait joliment la lumière sur un des plus grands scandales de l’histoire des États-Unis. Passionnant !