Cher lecteur, la série des tribulations de l’auteur en herbe que je fus se poursuit. Souviens-toi : une rencontre grincheuse avec un éditeur qui tourne court, un entretien avec une charmante conseillère éditoriale Solange qui me fait languir. A priori, l’histoire semblait vouée à un échec certain quand surgit Raoul, un blogueur.
En dépit de cette attente, un peu frustrante, du retour de Solange sur cette première ébauche, mon humeur reste guillerette. L’été déploie ses couleurs ensoleillées. Grande nouvelle : je vais enfin faire la connaissance d’un blogueur, Raoul, avec qui nous échangeons régulièrement des commentaires sur nos blogs respectifs. Habitant tous les deux la région parisienne, nous voilà bientôt devisant joyeusement à la terrasse d’un café tout en sirotant un petit coca bien frais. L’ambiance est décontractée, nous reconstruisons le monde. Au détour d’une phrase, je laisse échapper cette affaire de bouquin en pointillé et lui apprend que j’attends des nouvelles d’un conseil éditorial. Il réagit aussitôt et me rapporte qu’il s’occupe bénévolement d’une petite maison d’édition, en précisant qu’il assiste ses auteurs gratuitement, si nécessaire. Manifestement le sujet de l’argent l’intrigue, il se propose de lire ce qui a été déjà adressé à Solange et suggère de s’en parler à la rentrée. La chance !
En septembre, ses remarques sont les suivantes : « Sur la forme, votre prose ne fait pas un livre mais fournit plutôt un point de départ pour des conférences ou des articles. Néanmoins vous tenez des propos séduisants sur un sujet sensible. Votre style est agréable. Votre titre « Aimez-vous l’argent ? » est très bon. Vous serez légitime si vous positionnez votre ouvrage sous l’angle de vos convictions. Rédigez-moi un plan d’ici un mois et nous déciderons d’une suite éventuelle. ».
J’entrevois tout l’avantage d’une collaboration avec lui : il m’offre un suivi éditorial dont je pressens l’absolue nécessité et il est très sympathique, ce qui ne gâche rien. Alléchée par la tournure des évènements, je me plonge dans l’exercice corps et âme. Je remets un plan minutieusement travaillé, structuré en trois parties. Il faut croire que l’ensemble lui plaît car un mail me confirme : « Là, nous tenons un livre ».
Ensuite, au téléphone, il me précise le planning : remise d’un manuscrit pour Noël, relecture et corrections pour fin février et publication en juin. Je biche ! Il attend la première partie à la fin de ce mois. Dans ma folie, j’accepte, oubliant un point fondamental : le contrat. En personne naïve que je suis, je n’aurai l’audace à aucun moment de lui faire préciser ses intentions. Comme une jeune fille bien élevée dotée d’un optimisme béat, je me tairai, pensant qu’entre gens de bonne compagnie nous sommes.
En avant la musique ! Première déception et de taille, la proposition de soutien éditorial à laquelle je crois dur comme fer est balayée d’une phrase : « Si vous croyez que j’ai le temps ! ». Je dois me débrouiller toute seule.
Jusqu’à cette première livraison, je ne m’en sors pas trop mal. Mes idées sont claires et je m’amuse bien. Raoul d’un laconique : « On enchaîne », me donne le feu vert pour la suite. Il en profite pour me glisser quelques suggestions bienvenues, particulièrement sur le ton employé, qui lui paraît un poil agressif. Curieusement, aucun doute ne m’effleure sur la qualité du texte puisqu’il ne m’en dit rien. Pour l’heure, obnubilée par la date butoir, je travaille d’arrache-pied afin d’achever les deux-tiers dans les trente jours octroyés. Un cauchemar ! Je ne dors plus, je ne mange plus, je ne parle que de ça, je maigris à vue d’œil. Je patauge dans le plan que pourtant j’ai concocté. Je conduis une voiture dont je ne maîtrise pas la direction. Je m’écroule à la ligne d’arrivée de ce marathon, essoufflée, échevelée mais heureuse d’en avoir fini. Ouf !
"Pour qui je me prends? ou les tribulations d'un apprenti auteur"
Hélène de Montaigu
La série continue. Tu apprendras dans le prochain article le sort que cet éditeur me réservera.