En l'occurrence, l'expérimentation en cours avec CashEth ne sera certainement pas perçue comme révolutionnaire, puisqu'elle consiste simplement à émettre une monnaie virtuelle, directement adossée à une monnaie « réelle ». En parfait alignement avec les fondements des crypto-devises, la vision sous-jacente est d'adapter les instruments de paiement historiques – basés sur des pièces, des billets, des chèques, des cartes… – au monde de plus en plus numérique et dématérialisé d'aujourd'hui.
La particularité de CashEth est d'utiliser un « smart contract » (que je traduirais ici par « contrat programmé » plutôt qu'intelligent) – déployé sur le réseau Ethereum – pour gérer l'ensemble du système. Ces algorithmes vont donc prendre en charge, de manière entièrement autonome, la conversion entre monnaies réelle et virtuelle (dans les deux directions), les échanges entre participants, la tenue des positions… Son fonctionnement est ainsi optimisé, mais, pour l'utilisateur final, il ne s'agira, en apparence, que d'un porte-monnaie électronique comme un autre, libellé en dollars ou en euros.
Dans la mise en œuvre qu'en envisage Santander, la frontière entre les deux mondes – physique et en ligne – sera aussi transparente que possible. Il est question, en particulier, d'intégrer une option de conversion au cœur des services de banque en ligne, permettant d'alimenter ou de retirer des fonds du compte CashEth facilement (en attendant une automatisation totale ?). Par ailleurs, la banque mise sur l'adaptation du dispositif aux micro-paiements (à partir de 1 cent) pour en stimuler l'adoption.
Au-delà de l'expérimentation, un porte-monnaie électronique géré sur Ethereum a-t-il une chance de s'imposer ? D'un point de vue technique, l'idée est séduisante car les « contrats programmés » offrent une efficacité incomparable. Dans la pratique, les obstacles habituels devront être levés, notamment en termes d'adoption (par les consommateurs et par les e-marchands). L'intérêt montré par plusieurs banques (outre Santander) incite à l'optimisme, si, toutefois, elles convergent vers une implémentation commune et évitent la tentation de déclinaisons propriétaires incompatibles.