"Miracle à l'ONU", titre le journal en faisant son traditionnel jeu de mot
en l'occurrence avec le prénom de la députée
C'est un groupe de travail de l'ONU qui vient d'émettre un avis non contraignant sur la détention depuis le début de l'année de la militante très clivante Milagro Sala, députée du Parlasur, l'assemblée législative du continent, accusée par la justice provinciale de Jujuy de multiples abus d'argent public et autres concussions. Milagro Sala, en sa qualité de responsable du mouvement indigéniste, qui se présente comme révolutionnaire, Tupac Amaru, a reçu du gouvernement de Cristina Kirchner beaucoup d'argent, comme la plupart de ces organisations dites populaires, pour développer du logement et des activités économiques sous forme de coopérative. Or il y a eu beaucoup de coulage et il y a de fortes suspicions que l'argent ait disparu dans les poches des dirigeants des organismes, quand il n'a pas servi à faire tourner l'activité en vase clos, comme ce fut le cas de nombreux chantiers publics adjugés a priori ou après appels d'offre fictifs ou faussés à ces coopératives qui semblent bien n'avoir eu aucune autre activité que celles financées sur l'argent du contribuable.
Le groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies vient de transmettre au gouvernement national argentin un avis de libération immédiate de la députée, qui, au moment de son arrestation, était restée quinze jours sans aucun appui de personne dans son propre mouvement, pourtant mobilisé dans un seating, sur la place centrale de San Salvador de Jujuy. Le groupe de travail dit qu'il n'a pas été convaincu par les éléments du dossier qui lui ont été transmis par le gouvernement argentin. Il parle de violation des droits de l'homme et même d'indemnités à verser à la détenue à libérer.
Le gouvernement argentin fait la sourde oreille. Il s'estime non compétent sur ce dossier et c'est juridiquement justifié puisque le niveau national ne doit pas interférer avec la justice provinciale au nom de la séparation des pouvoirs. Néanmoins à gauche, le doute est plus que fort que la procédure ouverte contre la militante est une opération politique de la nouvelle majorité nationale, dont le gouverneur de Jujuy est membre. Il justifie aussi la situation par la gravité des actes imputés à l'inculpée et non pas sur des circonstances relatives à sa personne, qui seules justifient une décision de détention provisoire (personne dangereuse, personne susceptible de ne pas se présenter devant ses juges, etc.).
Página/12 et La Nación font état ce matin de cette péripétie du dossier, qui est un nouveau coup pour la diplomatie argentine, surtout parce qu'on sait que la ministre des affaires étrangères a longtemps travaillé au sein de l'organisation internationale dont elle connaît bien les arcanes. Or elle n'a pas été en mesure de prévenir un avis négatif sur une matière très sensible, en interne comme à l'extérieur, pour un pays d'Amérique du Sud, si fortement stigmatisé par les dictatures militaires de la fin de la guerre froide.
Pour aller plus loin : lire l'article de une de Página/12 lire l'article de Página/12 sur l'analyse de Claudio Avruj, secrétaire d'Etat aux droits de l'homme dans le gouvernement national lire l'article de La Nación, qui n'en parle pas à sa une lire l'article de La Nación sur la position du secrétaire d'Etat qui trouve normal la réduction de 12% de son budget (il est vrai que le budget de ce secrétariat a été anormalement gonflé pendant les années Kirchner pour soutenir la militance des associations qui ne faisaient pas du tout appel au public ni pour fonctionner par le bénévolat des adhérents ni pour financer leurs vastes programmes culturels dont ce blog s'est fait l'écho depuis le début) lire la dépêche de Télam sur les analyses divergentes entre opposition et gouvernement.