À l’honneur ce week-end au Festival du livre en Bretagne, l’Irlande célèbre les 100 ans de son insurrection contre la Grande-Bretagne.
Trois questions à Jacques-Yves Le Touze, coordinateur du comité Irlande 2016Quels échos ont eu les événements de Pâques 1916 en Bretagne ?
Durant tout le XIXe siècle, il existait un mouvement culturel – notamment avec le Congrès celtique – qui a participé à la renaissance celtique. Il comprenait aussi l’Écosse et le Pays de Galles, mais les liens étaient peut-être plus étroits entre la Bretagne et l’Irlande, toutes deux ayant le catholicisme en commun.Un premier parti national breton est même créé au début du XXe siècle. Mais la Première Guerre mondiale agit comme une césure. Quand l’insurrection irlandaise a lieu, les Bretons y voient d’abord l’action d’une petite bande de traîtres vis-à-vis de l’allié britannique. Il est d’ailleurs avéré que l’Allemagne leur avait fourni des armes.
Après la guerre, comment le regard des Bretons évolue-t-il ?
Pâques 1916, qui était militairement un échec, est un succès politique qui a eu un impact très fort sur le mouvement breton. En obtenant son indépendance, l’Irlande, sans chercher à jouer ce rôle, devient un exemple. Ce qui ressemblait à un certain régionalisme bourgeois fait place à de nouveaux militants politiquement plus radicaux.Mais l’Irlande inspire aussi un renouveau linguistique et artistique, notamment musical à partir des années 1950. Des événements comme le Festival de Lorient ont agi comme une vitrine pour la scène irlandaise. Ce pays, parfois mythifié, devient un lieu de pèlerinage obligatoire pour des générations de militants.
Il ne faut pas non plus oublier les mauvais côtés de cette influence, notamment quand certains ont essayé de reproduire Pâques 1916 pendant la Seconde Guerre mondiale : le contexte avait changé et les Allemands n’étaient pas les mêmes.
Et aujourd’hui ?
L’intérêt des Bretons pour l’Irlande s’est normalisé depuis une quinzaine d’années. Les facilités de voyage ont sans doute participé à sa démythification. Actuellement, l’influence politique serait davantage écossaise. Mais l’Irlande conserve un capital sympathie évident en Bretagne. Il y a toujours énormément de liens dans des secteurs très différents. Par exemple, avec la création de clubs de football gaélique, des échanges entre universités, les quelque 120 jumelages entre communes, etc. Si vous interrogez dans la rue un Breton sur Pâques 1916, il est peu probable que ça lui parle. Pourtant, sans ces événements, la Bretagne en tant que telle ne serait aujourd’hui pas la même.Vendredi 28 et samedi 29 octobre, colloque organisé par Le CRBC-Rennes 2 dans le cadre du Festival du livre de Carhaix « Les influences irlandaises : 1916 – 2016 » à l’occasion du centenaire du soulèvement de Pâques 1916. Ouvert à tout public. Renseignements sur le site du festival.
Maxime Lavenant
Ouest-France