je dois vous dire tout d'abord
que je me suis faite toute seule et...
que je me suis ratée.
Je me suis ratée, quoi !
J'ai d'autant plus de mérite à l'avouer que ça ne se voit pas tellement !
Encore que personne ne m'ait jamais dit :
"Vous vous êtes réussie !"
En réalité, je me suis faite plus moche que je ne suis !
Tout au début, tandis que je me faisais, je voyais bien que je ne me faisais pas bien.
Mais comme à chaque fois que je disais que je me faisais mal, les gens disaient : "C'est bien fait !",
J'ai continué à me faire mal en croyant bien faire.
Et puis, quand j'ai vu la tournure que je me prenais, j'ai tout arrêté.
Et je me suis laissée dans l'état où vous me voyez !
Alors, on a dit :
"Non seulement, elle est ratée, mais en plus, elle n'est pas finie !"
Eh, bien, j'aime mieux cela !
J'aime mieux ne pas être finie !
Une femme finie, elle est finie !
On a beau me dire : "elle est réussie !"
Je réponds : "Oui ! Mais elle est finie !"
Au fond, je préfère être inachevée, comme une symphonie !
Il y a de belles symphonies inachevées.
Encore que personne ne m'ait jamais dit :
"Vous êtes une belle symphonie inachevée ! "
L'avantage, quand on s'est raté, c'est qu'ensuite, on peut tout rater impunément, personne ne vous en fait grief !
On se sent sûr de soi.
Exemple :
chaque fois que je fais un pas en avant et que je le rate, j'ai la sensation de progresser !
Encore que personne ne m'ait jamais dit :
"Sur le plan raté, vous avez fait des progrès !"
Et pourtant, j'en ai fait !
Je rate mieux qu'avant !
Avant, je ratais une fois sur deux !
Maintenant, je rate à tous les coups !
Finalement,
il n'y a qu'une chose que je sache bien faire :
c'est rater !
Si bien que, si c'était à refaire, s'il fallait que je me refasse, je me raterais de la même façon !
Parce que, dans le fond, on ne se refait pas !