Pour ceux qui ne s’en souviennent pas, du même auteur, j’avais placé « Le silence du banlieusard », premier de mon top 10 en 2013. C’est dire que j’avais des attentes face à ce titre.
Vous savez combien nous, les Québécois, sommes friands des téléséries. Hugo Léger s’approche de cette réalité, à sa façon, par le biais du vedettariat. Un homme simple et pas seul, avec une conjointe qu’il aime, tombe en amour de la vedette d’une télésérie très populaire. C’est un peu gênant pour lui, il se prend au jeu au point tel qu’il cache de sa conjointe pour savourer sa vive émotion, face à face avec son téléviseur. Il aime tout de cette vedette, qui incarne à l’écran une procureure, et s’imagine qu’ils ont des atomes crochus. On le voit fortement entiché, pas loin d’être hypnotisé.
Cet homme pratique le métier rare et inusité de comportementaliste canin. Son travail l’amènera à côtoyer cette vedette sacrée de l’écran.
J’ai beaucoup aimé le début de l’histoire lorsque l’homme est ensorcelé par les images envoûtantes d’un écran. L’amour qui paralyse, qui donne un choc ramène à une émotion que nous avons déjà presque tous déjà éprouvée : l’idolâtrie. Qui n’a pas à tout le moins déjà voué un amour démesuré et déconnecté pour une personne loin de soi : chanteur, animateur, comédien, magicien ? Être un fan, n’est-ce pas cette émotion mais en plus mesurée ? Cette partie du roman contient sa part de magie et de mystère, lesquels j’ai appréciés.
J’oubliais de vous parler d’une audace de l’auteur : il a entrepris de nous décrire chaque épisode de la télésérie. Nous lisons donc une télésérie. Gros défi qu’il s’est donné puisque regarder du fictif à l’intérieur du fictif est un concept amusant mais qui ne tient pas nécessairement en haleine. Le lecteur ne perds jamais de vue, que ce qu’il lit est fictif et ne se laisse pas obligatoirement obnubilé comme le personnage de Xavier Lambert.
J’avais évidemment hâte de savoir qu’est-ce qu’il arriverait à ce Xavier : allait-il quitter sa conjointe pour un sentiment issu hors de sa vie ? Est-ce que le fait qu’il soit tombé éperdument amoureux signifiait qu’il n’aimait pas vraiment sa conjointe ? Était-ce, comme la croyance populaire le veut, nous commettons un acte extraconjugale parce qu’il y a déjà une fissure dans notre relation ? J’avais à cœur ces questions et les possibles réponses m’interpelaient.
C’était sans compter que l’auteur ne m’amènerait pas nécessairement dans ces dédales, en fait, qu’il serait même tenté de les contourner.
Revenons au fait que notre homme est comportementaliste canin, ce qui l’amènera à fréquenter la fameuse vedette de son écran. Celle-ci deviendra un être de chair et d’os, faisant partie intégrante de son quotidien. Je vous avoue ma déception. C’est comme si la magie avait disparu d’un coup de baguette. La sublimation s’est volatilisée et nous nous sommes retrouvés au cœur d’une banale histoire de trio amoureux. Le questionnement perdait du coup beaucoup de sa subtilité.
Et c’est sans compter que je ne sois pas arrivé à croire au métier du protagoniste principal. Je n’ai pas vu Xavier Lambert, incarnant un comportementaliste canin. Pour un roman qui aborde l’apport et la portée du fictif dans nos vies, ce métier est resté pour moi une mise en scène avec tout le côté artificiel que laisse parfois le fictif quand le rendez-vous est manqué.
Un roman concept, auquel on ne peut reprocher le manque d’audace mais qui, malheureusement, survole le thème abordé.