Comment choisir des vins écolo : quand qualité rime avec écologie !

Par Blanchemanche
#vinsbio
Elsa Ginestet
Rédactrice experte du monde du vin e-RSE.net

Comment choisir des vins de manière écologique ? Quels sont les vins qui respectent mieux la planète ? Ceux qui contiennent le mois de pesticide et / ou de sulfites ? On vous explique.Nous l’avons vu dans les deux premières parties de cet article, la viticulture conventionnelle productiviste et intensive est un danger pour l’environnement et la santé publique et ne peut plus continuer en l’état. Pour répondre à ce problème, l’émergence des labellisation écologiques apparaît comme une très bonne tendance. Pour autant, les choses sont plus complexes qu’il n’y paraît : les certifications n’offrent pas toutes les garanties, et certains vins sans labels peuvent être très “green”. Mais pas de panique, il existe des astuces à savoir pour choisir des vins vraiment écolo !

Choisir un vin plus écolo : les certifications environnementales c’est bien, mais pas suffisant

La viticulture bio, ce n’est pas “tout vert”

Indéniablement, les vins bio/biodynamiques (et peut être bientôt les vins natures s’ils obtiennent une certification officielle) offrent une bonne garantie aux consommateurs puisqu’ils sont sensés garantir l’absence de produits de synthèse. Pour autant, il ne faut pas croire qu’il n’y a pas de pesticides dans le vin bio, ou que le vin bio est forcément écologique ! Ainsi, comme l’ont démontré de nombreuses analyses on retrouve des traces et résidus de pesticides dans 100% des vins bio. Cela paraît logique puisque malheureusement, les pesticides ne s’arrêtent pas à la parcelle traitée, les vignobles voisins en contiennent forcément des traces, même s’ils n’en utilisent pas eux même. Et puis, en viticulture biologique, de nombreux pesticides (naturels) sont autorisés : le cuivre, l’éthylène, le sel de potassium, le polysulfure de calcium, le permanganate de potassium ou encore l’hydroxyde de calcium.De plus, paradoxalement, la conversion des vignobles au bio peut parfois avoir certains effets nocifs sur l’environnement, comme l’explique André Fuster dans le dernier numéro d’En Magnum(André Fuster, « Le cosmique de répétition », En Magnum n°4, juin-juillet-août 2016). Tout d’abord, parce qu’être en agriculture biologique ne signifie pas forcément respecter l’environnement sur tous les tableaux, ni produire du bon vin. La viticulture bio par exemple autorise l’usage de sulfate de cuivre comme agent pesticide. À haute dose, ce produit participe à la contamination des sols et des eaux, au même titre qu’un pesticide chimique. C’est donc plutôt l’utilisation du produit qu’il faut regarder que le produit lui même, si l’on souhaite acheter un vin écolo.À l’inverse, certains produits de synthèse sont interdits en agriculture bio alors qu’ils ne sont en principe pas nocifs pour l’environnement et qu’ils peuvent être biodégradables. Le souffre de synthèse par exemple, est interdit en agriculture bio alors qu’il est souvent plus pur que les souffres naturels (qui peuvent contenir des métaux lourds et de l’arsenic, mais sont autorisés en bio). Des pesticides naturels, autorisés en bio sont au contraire connus pour être nocifs pour l’environnement. C’est le cas de la pyréthrine (un insecticide naturel, à base de plantes, mais à spectre large) qui est la seule méthode autorisée en bio pour se prémunir contre la flavescence dorée (une maladie pouvant détruire toute les récoltes d’un vignoble). Ce produit a des effets extrêmement néfastes sur la faune auxiliaire, notamment les abeilles et les pollinisateurs pourtant si précieux pour l’équilibre de l’environnement. En 2014, un viticulteur bio avait même été condamné à une amende car il avait refusé d’utiliser ce produit à cause de ses convictions écologiques. Le tout alors que certains équivalents synthétiques auraient pu être utilisés sans dommage sur l’écosystème pour se prémunir contre la maladie.D’une manière générale, la transition vers la viticulture bio entraîne aussi une augmentation significative des quantités de produits utilisés. En effet, les produits bio étant moins efficaces, moins concentrés, et avec une biodisponibilité moins importante, il faut en mettre plus en quantité (jusqu’à 80 x plus) pour obtenir les mêmes effets protecteurs qu’avec certains produits de synthèse. Pour certains produits, cela contribue à saturer le sol en substances potentiellement dangereuses (comme le cuivre, dans le cas du sulfate de cuivre). Autre problème : ces quantités de produit, il faut les produire, les transporter, et tout cela pollue.

Les paradoxes et difficultés des labels bio et écologiques

Mais surtout, les certifications sont complexes à obtenir dans la viticulture, et un certain nombre de vignerons ont fait marche arrière après un essai de certification. Il faut dire que dans certaines régions moins clémentes du point de vue climatique le choix du bio peut parfois être un pari risqué… Parfois, pour sauver une récolte d’une maladie ou d’un parasite, un vigneron n’aura pas d’autre choix que d’appliquer un traitement chimique ponctuel. Dans ce cas, tous les efforts de conversion au bio engagés (tout de même trois ans en bio au minimum, afin de pouvoir obtenir le label), seront réduits à néant. Ainsi cette année en Bourgogne, des vignerons ont fait face à un choix très difficile : perdre leur récolte affectée par le mildiou, ou traiter leurs vignes avec des produits de synthèse qui leur feraient perdre leur label bio. À cause de cette absence de souplesse, de nombreux vignerons refusent la conversion à l’agriculture biologique, malgré de fortes convictions écologiques.A l’inverse, certains remettent en question l’authenticité de l’agriculture biologique et le sérieux de la démarche. En effet, même s’il y a des audits réguliers, et même si la réglementation bio en viticulture est assez stricte, personne n’est présent dans les vignes et les chais au quotidien pour vérifier que la réglementation est bien appliquée. En France par exemple chaque producteur en bio n’est inspecté en moyenne qu’1,6 fois par an (30% des visites seulement sont faites à l’improviste). Et alors que le raisin peut-être biologique, ça n’empêche pas que des produits de synthèse soient utilisés pendant la vinification. On peut donc comprendre que certains soient dubitatifs quant aux garanties offertes par le bio dans la viticulture.L’idée n’est bien sûr pas de dire que le bio est mauvais ou qu’il est moins bon que l’agriculture conventionnelle, loin de là. L’agriculture et la viticulture biologiques sont souvent une garantie que les procédés utilisés sont meilleurs pour la planète, mais aussi (bien souvent) pour la santé. Mais il faut garder un esprit critique : certains produits utilisés en bio peuvent être nocifs, comme c’est le cas en conventionnel, et à l’inverse, certaines vignobles en viticulture conventionnelle peuvent être très écologiques ! Tout est une question de pratiques de production, de modération et de bon sens, plus que de produits véritablement. Ainsi, un viticulteur conventionnel qui traite ses vignes de façon modérée, lorsqu’il en a besoin, mais pas en excès, pourra être plus écologique qu’un viticulteur bio qui traite sa vigne en préventif, sans se préoccuper de l’effet sur l’écosystème. La viticulture étant très complexe, il serait sans doute plus intéressant du point de vue environnemental de réformer ces labels afin qu’ils soient plus adaptés à la réalité du terrain. Il ne faut pas refuser par principe un produit car il est synthétique s’il est plus adapté (et parfois plus écologique au final) qu’un produit naturel pour traiter un problème !Mais alors, pour le consommateur, comment faire pour choisir un vin vraiment écologique ?

Et si les vins écologiques étaient tout simplement les vins qualitatifs ?

Les labels bio ou biodynamie sont un bon moyen de repérage au départ si l’on cherche un vin plus écologique, mais il ne faut pas pour autant en faire une règle absolue.

Des vins non certifiés mais très écolo ?

En effet, de nombreux domaines non labellisés ont des pratiques viticoles tout à fait saines, qui répondent à tous les critères de certifications bio ou biodynamiques et vont même au-delà dans la démarche environnementale, sans avoir pour autant fait le choix de la certification. Plusieurs raisons peuvent pousser un domaine à refuser la certification :  le prix de la certification et la logistique qu’elle demande (3 ans d’efforts avant d’être certifié), rejet du système des certifications, absence de besoin marketing, ou encore la volonté de rester indépendant des contraintes du bio qui sont parfois contreproductives du point de vue écologique.Il ne faut donc bien sûr pas s’interdire de consommer les vins d’un domaine que l’on connaît et dont on sait que les pratiques sont écologiques. Beaucoup de vins considérés parmi les meilleurs au monde selon les amateurs rentrent dans cette catégorie, à l’instar du Clos Rougeard à Saumur-Champigny, dont les vignes n’ont jamais connu le moindre produit chimique, mais qui n’a jamais cherché à obtenir de certification. Nady Foucault expliquait : « Nous, nous refusons d’avoir un label. Cela fait des siècles que nous travaillons de la même façon ! Nous ne voulons pas profiter de cet engouement pour le bio, notre priorité, c’est que les amateurs reconnaissent que nos vins sont bons. C’est tout. ».De la même manière, Jacky Blot, célèbre vigneron ligérien aime se définir comme un «sans-papiers du bio» (domaines de La Taille aux Loups et de La Butte). Pour lui, la réglementation de la viticulture biologique ne va pas assez loin pour de multiples raisons comme «l’absence de restriction sur les volumes de production possibles par hectare, l’usage autorisé des cuves en inox, la possibilité d’utiliser des produits pour rectifier des déviations aromatiques». Les exemples de très grands vignerons dans cette position sont nombreux, citons par exemple Georges Roumier à Chambolle-Musigny et les champagnes Jacques Selosse ou Agrapart & Fils. Ce sont généralement des vignerons dont le talent est mondialement reconnu et qui écoulent donc leur production sans le moindre problème. Ils ne voient dans les labels que de simples outils marketing couteux et inutiles. C’est la raison pour laquelle parmi les plus grands vins, nombreux sont ceux qui n’ont aucun label alors même que leurs pratiques le leur permettrait.Au final, pour ces vignobles qui mettent tous leurs soins à produire le meilleur vin possible, le respect de leurs vignes, un travail sur la qualité et la “vie” de leur sol et la volonté de vinifier le plus naturellement possible pour livrer la quintessence du vin (levures indigènes, un minimum de soufre, peu d’intrants…) les mènent logiquement à faire un travail respectueux de l’environnement.

Les pesticides d’accord, mais le reste ?

Il ne faut pas non plus oublier qu’il n’y a pas que les pesticides qui entrent en jeux dans le cadre d’une consommation responsable et respectueuse de l’environnement, puisque comme nous l’avons vu, la mise en bouteille, le transport et la fin de chaîne peuvent également avoir un impact considérable sur l’environnement. Sur ce sujet, certains domaines ont fait des progrès considérables, notamment en Champagne – qui part de loin, certes puisque les bouteilles de champagne sont les plus lourdes -, où les émissions de CO2 par bouteille ont diminué de 15% depuis 2003 et vise même une réduction de 75% de son empreinte carbone à l’horizon 2050. Récemment, les champagnes Drappier sont devenus la première maison champenoise certifiée neutre en émission carbone. Il ne suffit pas d’être bio pour avoir une stratégie écologique globale, par exemple sur la biodiversité ou sur la faune locale. Les Caves de Buzet (qui sont une coopérative de vins écologiques, dont une partie seulement des vins est bio) ont ainsi une stratégie beaucoup plus avancée que les seules certifications sur la question de la biodiversité. Elles ont mis en place un programme de réintroduction de certaines espèces de chouettes menacées sur leurs domaines par exemple, chose qui n’est pas prise en compte par les certifications bio ou biodynamie.En conclusion, nous pourrions dire que les vins biologiques, biodynamiques et natures, sont un bon indicateur de choix (l’un des meilleurs) en l’absence de plus de connaissance sur un vin. Mais ces certifications gagneraient à s’améliorer encore, et surtout d’autres critères sont à prendre en compte si l’on souhaite consommer des vins plus écolos et plus sains. Le mieux est de bien se renseigner sur les vins que vous consommez, en vous intéressant aux domaines que vous achetez ! Lire les contre-étiquettes, les sites internet, ou encore visiter les domaines sont une manière de savoir si un vignoble est responsable et s’il est réellement écologique.
Et comme souvent, ces sont les vignobles qui font des vins de qualité qui font le plus attention à l’écosystème, qui reste, après tout, leur seul outil de travail.http://e-rse.net/choisir-vin-ecologique-pesticides-sulfites-labels-22111/