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Conservation du corps : qu’en est-il de la plastination ?

Publié le 23 septembre 2016 par Daniel Leprecheur

Très utile d’un point de vue médical et pédagogique, elle pose cependant une problématique éthique dans la mesure où elle intervient également dans le traitement de corps qui sont ensuite destinés à être montrés dans des expositions à vocation artistique.

Qu’en est-il exactement de cette pratique et de cette polémique ?

La méthode de la plastination

visage-plastinationInitiée à la fin des années 70 par l’anatomiste allemand Gunther Von Hagens, la plastination fut adoptée par nombreux de scientifiques de par le monde.

Le procédé se déroule en plusieurs étapes :

Dans un premier temps, le cadavre est plongé dans du formol, afin d’endiguer la décomposition des tissus, musculaires, veineux, organiques, nerveux et autres.

Il est ensuite baigné deux semaines durant dans de l’acétone froide, puis de l’acétone chaude ; il s’agit de retirer les liquides comme l’eau et le sang, puis de faire fondre les graisses.

C’est alors le moment clé de l’immersion dans une cuve de silicone de caoutchouc ou de résine d’époxy, qui aboutira à la fixation du corps, à la préservation des nuances, tout en conservant la souplesse initiale.

Suit l’utilisation du corps ou des organes, la mise en forme de la dépouille à des fins d’exposition en collection anatomique.

Les atouts de la plastination

plastinationCette technique suppose un long processus : de 6 mois à 1 an de travail pour aboutir à la préservation de la dépouille.

Elle entraîne une conservation sur une longue durée, ce qui n’est pas négligeable dans la mesure où les facultés de médecine ne disposent pas de nombreux corps, les dons à la science étant rares.

La plastination a cet avantage de conserver la couleur et la souplesse des tissus corporels : une authenticité nécessaire pour des études fiables.

Il est possible d’exposer l’intérieur du corps, de pratiquer des coupes longitudinales d’une même dépouille, de mettre en perspective ossature et système organique …d’où le véritable apport pédagogique.

On peut aussi donner aux dépouilles des attitudes du quotidien, montrer les cadavres en train de jouer au ballon, de faire du vélo … c’est ainsi l’opportunité de voir les rouages de l’organisme en action.

Plastination et polémique

tete-ouverteLa plastination offre donc une grande liberté dans la manière d’aborder et d’étudier les corps ; la polémique surgit quand cette méthode sort du champ purement scientifique pour être utilisée dans le cadre artistique, avec pour finalité l’organisation d’expositions payantes, orchestrées afin d’initier le public.

Programmée en 2009 par la société Encore Events, l’exposition Our Body – A corps ouvert scénographiait plusieurs écorchés « plastinés » dans des situations du quotidien. L’objectif était de mettre en avant les secrets anatomiques du corps humain, dans la grande tradition des momifiés de Fragonard, des spécimens biologiques collectés dans les cabinets de curiosité.

L’exposition fut censurée suite aux plaintes déposées en justice par plusieurs associations de défense des droits de l’Homme. En cause, la provenance mystérieuse des cadavres, dont on soupçonnait qu’ils étaient ceux de condamnés à mort chinois victimes d’un trafic illicite, et non pas les dépouilles de personnes consentantes ayant céder leur corps dans ce but.

La Cour de Cassation a finalement annulé l’événement, mettant en avant le respect dû à la dépouille comme l’explique l’article 16-1-1 du Code Civil :

« Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence ».

La plastination en France

corps-plastineS’il est aujourd’hui éventuellement possible d’être « plastiné » dans le cadre universitaire du don de son corps à la science (même si cette méthode est peu employée en France), il est en revanche impossible de le faire dans une perspective purement esthétique et mercantile.

En effet l’article 225-17 du code pénal stipule que :

« Toute atteinte à l’intégrité du cadavre, par quelque moyen que ce soit, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».

Cela implique la profanation du cadavre comme de la sépulture, mais aussi sa préparation à des fins d’exhibition .

On sait que Gunther Von Hagens met des formulaires de dons à disposition des visiteurs de ses expositions, pour ceux qui, séduits par cette perspective de devenir œuvre d’art après leur mort, voudraient sauter le pas…

Il est par ailleurs possible d’en faire la demande via le site faisant la promotion de la manifestation Bodyworlds. Il y aurait à ce jour environ une vingtaine de français parmi les donateurs. Précisons cependant que ce site est allemand, de même l’entreprise de Von Hagens basée à l’étranger, et qu’ils dépendent d’une législation autre que la loi française.

Il faut également prendre en compte le fait que l’anatomiste a inauguré un site de vente de cadavres à des fins de plastination, entraînant une vague de protestations et d’indignation devant ce type de commerce. Aussi il est fortement recommandé de se renseigner plus avant, en amont d’un quelconque legs qui pourrait éventuellement déboucher sur la vente d’un corps qu’on désirait céder gratuitement à des fins d’investigation scientifique gratuite.


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