Il faut accueillir les migrants. Si la vie de nos concitoyens s’avère si difficile socialement, est-ce la faute des migrants ou des politiques libérales et d’austérité mises en œuvre depuis si longtemps ? Les débats majeurs, ceux qui nous déterminent, méritent de la vigilance et ce surcroît d’attention et d’intelligence collective qui devrait être le propre d’une grande République comme la nôtre. Assez souvent, pourtant, ceux qui font profession de parler au nom des Français nous donnent la nausée. Que dire de l’attitude des responsables de droite et de son extrême dès que le mot «migrants» est prononcé? Comment réagir face à l’ignominie de ce que nous entendons quotidiennement, sachant que plus l’ignominie sera terrible, plus elle s’attirera une place de choix dans les médias? À écouter les Wauquiez, les Estrosi, les Sarkozy et les autres, qui n’ont que « la France, la France » au bout des lèvres, le pays de Voltaire et d’Hugo devrait cesser d’être une terre d’accueil. Dans ce contexte de surenchères irresponsables, qui attisent la haine des uns contre les autres et au bout du compte accréditent la xénophobie, le Front national vient même de créer un collectif de maires intitulé Ma commune sans migrants… vous savez, ces peaux foncées, ces parasites, ces illettrés, ces bas morceaux, ces morts-la-faim…
Maintenant, ça suffit! Les migrants sont nos frères en humanité, nos frères de classe. Les Français dans leur masse pensent comme nous, ils ne doivent plus se taire! Car tout de même, de quoi parle-t-on? De quelques milliers de réfugiés, alors qu’une nation de 65 millions d’habitants pourrait en recevoir infiniment plus. Si la vie de nos concitoyens s’avère si difficile socialement, est-ce la faute des migrants ou des politiques libérales et d’austérité mises en œuvre depuis si longtemps? Devant ce que nous appelons «le drame des migrants», en réalité le drame de millions de réfugiés, dont la moitié sont des enfants, notre devoir de solidarité et d’accueil doit être aussi sacré que «Liberté, égalité, fraternité». Ces gens fuient la misère, la persécution et les guerres qui ont été provoquées ou attisées de ce côté de la planète. Nous ne devons pas tergiverser, mais convaincre, engager une bataille d’idées, sur des engagements clairs et des principes intangibles. Les exemples de Paris et d’Ivry-sur-Seine, qui accueilleront des centres d’urgence, nous rappellent que certains édiles ont le courage d’assumer franchement l’humanité de la France. Et le bien-fondé universel de notre République.
[EDITORIAL publié dans l’Humanité du 21 septembre 2016.]