Critique Ciné : Victoria (2016)

Publié le 15 septembre 2016 par Delromainzika @cabreakingnews

Victoria // De Justine Triet. Avec Virginie Efira et Vincent Lacoste.


Ce qui est étrange avec Victoria c’est à quel point elle dépeint la dépression avec un sens du réalisme important. Virginie Efira est parfaite dans le rôle de cette femme dont la vie est en train de basculer, dans le mauvais sens du terme. Elle se retrouve alors dans une spirale infernale où tout ce qui se passe dans sa vie est en train de partir en sucette. Vincent Lacoste, bien que transparent une partie du film (et cela colle avec l’impression que son personnage veut donner à un moment), trouve le ton juste bien que son jeu reste attendu. Après La Bataille de Solférino qui ne m’avait pas spécialement convaincu, Justine Triet est de retour et ce second long métrage sait faire à mon sens l’unanimité. Le film échappe à la leçon de morale et propose un portrait intelligent de la dépression. On ne connait pas forcément tous ce que c’est car l’on ne l’a pas tous vécu, mais pour avoir expérimenté une dépression légère dans ma propre vie, ce que vit Victoria est finalement quelque chose que j’ai l’impression de connaître. Parfois un peu trop. Le film sait toujours échapper à la comédie facile et préfère le tragicomique soigné. L’écriture est rythmée et le film gère toujours le temps qu’il passe sur chaque scène avec fascination.

Victoria Spick, avocate pénaliste en plein néant sentimental, débarque à un mariage où elle y retrouve son ami Vincent et Sam, un ex-dealer qu’elle a sorti d’affaire. Le lendemain, Vincent est accusé de tentative de meurtre par sa compagne. Seul témoin de la scène, le chien de la victime.
Victoria accepte à contrecœur de défendre Vincent tandis qu'elle embauche Sam comme jeune homme au pair. Le début d’une série de cataclysmes pour Victoria.

Victoria aurait très bien pu tomber dans le pathos longuet que j’ai tendance à détester mais le film trouve un juste équilibre dans la tendresse qu’il tente de faire passer. Ce n’est jamais trop, ce n’est jamais niais, c’est juste ce qu’il faut. Virginie Efira est pour beaucoup dans la réussite de ce personnage qu’elle incarne par moment à nous laisser penser que c’est elle et non plus son personnage. Grâce à quelques belles envolées comiques (et notamment grâce à la talentueuse Laure Calamy qui à chacune de ses apparitions parvient à nous faire rire à gorge déployée). Virginie Efira s’impose en tout cas une fois de plus comme la reine de la comédie française, qui sait aussi bien se glisser dans les chaussons de personnages drôles que de personnages plus doux-amères, comme ici. Victoria ne cherche pas la légèreté, juste à nous faire comprendre ce que c’est que de vivre une période difficile de sa vie où le plaisir à disparu et laissé place à un néant que l’on tente de combler par tout ce qui peut nous faire du bien : sa réussite professionnelle, des relations sexuelles d’un soir, etc. C’est souvent beau et frais et Justine Triet a bien compris le sens de l’histoire qu’elle met en scène.

A chaque fois elle utilise sa caméra afin de créer des moments délicieux, elle sublime ses personnages et les relations qu’elle tente de créer entre eux. Victoria fait partie de ces films que l’on attend pas et qui savent à la fois nous bouleverser et nous faire rire instantanément. C’est simpliste, mais c’est toujours soigné. Le film brosse un beau portrait universel de femme qui veut être forte. Ce n’était pas facile à faire mais Justine Triet a réussi son second long métrage en espérant que le prochain soit aussi bon. Présenté en ouverture de la Semaine de la Critique 2016, Victoria pourrait bien être l’une des révélations de cette année cinématographique française.

Note : 8/10. En bref, un portrait tendre et intelligent de la dépression moderne.