Magazine Société

Belgique: détention des délinquants souffrant de problèmes mentaux

Publié le 14 septembre 2016 par Podcastjournal @Podcast_Journal
Rédacteurs et stagiaires: cliquez sur cette barre pour vous connecter en back-office de la rédaction! Recherche par tags (mots-clés) Recherche d'évènements (agenda) Cet arrêt concernait un homme, W.D., arrêté pour attentat à la pudeur sur un mineur de moins de 16 ans. En 2006, la justice belge considérant que W.D. était irresponsable en raison de son trouble mental, il fût interné dans l’aile psychiatrique d’une prison. Différents rapports psychiatriques ont ensuite indiqué qu’il devait intégrer un centre d’hébergement, mais les démarches entreprises en vue d’un placement à l’extérieur de la prison n’ont pas abouti. Au moment du jugement, le requérant résidait donc depuis près de neuf ans dans la prison.

La Cour rappelle tout d’abord que l’insuffisance de la prise en charge des personnes délinquantes atteintes de troubles mentaux est un réel problème au niveau international. Elle précise notamment que les ailes psychiatriques ne sont pas des lieux de détention adaptés pour ce type de personnes en raison de l’insuffisance de personnel, de la mauvaise qualité des soins et de la surpopulation.

En ce qui concerne en particulier la situation de W.D., la Cour estime que son maintien en aile psychiatrique durant une longue période sans espoir de changement et sans suivi médical approprié constituait pour lui une épreuve pénible excédant le niveau de souffrance inhérent à la détention. La Cour conclut donc à un traitement dégradant et dit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention, qui interdit de tels traitements. La Cour relève que la prise en charge du requérant à l’extérieur de la prison était envisagée depuis 2009, mais que les démarches pour réaliser ce transfert se sont révélées infructueuses en raison du refus des centres d’hébergement d’admettre le requérant. Or, elle estime que l’internement de W.D. dans un lieu inadapté à son état de santé depuis 2006 a rompu le lien requis par l’article 5 §1 e) de la Convention européenne des droits de l'Homme entre le but de la détention et les conditions dans lesquelles celle-ci a lieu. Elle conclut donc à la violation du droit à la liberté et à la sûreté garanti par cet alinéa de l'article 5, qui concerne "la détention régulière d’une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d’un aliéné, d’un alcoolique, d’un toxicomane ou d’un vagabond". La Cour constate qu’en l’absence d’une réelle possibilité de prise en charge par un établissement extérieur, il était inutile pour les autorités d’ordonner son transfert vers un tel centre. Elle explique que c’est le manque de personnel qualifié en prison, couplé au manque de places adaptées dans le circuit extérieur, qui sont à l’origine de l’ineffectivité des recours. Ainsi, la Cour conclut que W.D. ne disposait pas d’un recours effectif susceptible de redresser la situation dont il était victime. Elle conclut dès lors à la violation de l’article 5 §4 (légalité de la détention) et de l’article 13 (droit à un recours effectif) combiné avec l’article 3 de la Convention. La Cour estime que la situation de l’espèce est due à un dysfonctionnement structurel du système belge d’internement et décide donc de faire de cet arrêt un "arrêt pilote". Cela signifie qu’en attendant l’adoption de mesures de redressement par le gouvernement belge, la Cour ajourne la procédure dans toutes les affaires analogues pendant deux ans à compter du jour où cet arrêt sera devenu définitif. Durant ce temps, la Belgique devra remédier à ce problème général, ainsi qu’à la situation particulière des requérants qui ont porté leurs requêtes devant la Cour avant le prononcé de cet arrêt ou qui saisiront la Cour ultérieurement.

Lire l'intégralité de l'arrêt sur HUDOC

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Podcastjournal 108031 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazine