Si le fameux service de police chargé d’élucider les vieilles affaires non résolues s’intéresse cette fois à la disparition inexpliquée d’un fonctionnaire du Bureau d’aide au Développement qui était en Afrique pour enquêter sur de possibles malversations financières, l’équipe de choc met cependant du temps à entrer en scène. Jussi Adler-Olsen démarre en effet son intrigue en Afrique et plus précisément au Cameroun, avant de nous emmener sur les traces de Marco, un jeune gitan qui écume les rues de Copenhague pour délester les passants de leurs biens, tout en rêvant d’un avenir meilleur, loin de son oncle tyrannique qui dirige le clan.
De plus, le petit Marco est tellement attachant que ses déboires relèguent nos amis du département V au second plan. Heureusement, le chemin du jeune pickpocket finit par croiser celui de Carl Mørck et sa bande lorsqu’il se retrouve bien malgré lui au centre de l’enquête entourant la mystérieuse disparition de William Stark. Cette nouvelle intrigue tient à nouveau la route et n’a aucun mal à nous tenir en haleine de la première à la dernière page. Cette cinquième enquête du département V aborde également des sujets d’actualité, tels que l’immigration et l’exploitation des minorités, tout en pointant à nouveau du doigt une société danoise dont les hauts dignitaires n’hésitent cette fois pas à détourner l’argent destiné à des programmes d’aide humanitaire.
Pour le cinquième dossier de ce « Cold Case » à la danoise, le lecteur prend donc à nouveau plaisir à retrouver ce trio improbable, même s’il se retrouve un peu dans l’ombre de Marco. Outre la psychologie très soignée des personnages, Jussi Adler Olsen nous régale avec leur complicité et leurs interactions. Il y a tout d’abord le policier bourru, classique dans son genre : un fin limier avec une grande gueule, qui n’est pas fort apprécié par ses collègues. Si le personnage de Carl Mørck est très réussi, la vedette revient néanmoins inévitablement à son assistant Hafez el Assad. Cet homme à tout faire se révèle à nouveau plein de surprises et… de proverbes débordant de dromadaires. Ce réfugié politique syrien qui prend son boulot très à cœur est un personnage très attachant dont chaque intervention fait mouche et dont le passé intrigue au plus haut point. Puis il y a la dernière recrue en date, Rose, qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et qui est également réfractaire à toute forme d’autorité. De plus, si notre ami Carl Mørck doit gérer une équipe toujours aussi originale, tout en s’attaquant à un nouveau dossier épineux, il doit également faire face à une vie privée de plus en plus compliquée et même intégrer un véritable boulet imposé par son nouveau chef de département au sein de son équipe. Heureusement que les progrès de son ancien coéquipier paraplégique sont là pour lui réchauffer le cœur.
L’auteur prend donc amplement le temps de soigner la psychologie de ces personnages, qui prennent de l’ampleur au fil des tomes. Les personnages secondaires ne sont pas non plus en reste, que ce soit Hardy, le coéquipier tétraplégique qui squatte son salon, ou Mona Ibsen, la psychologue dont il est éperdument amoureux, voire même les enfants soldats africains qui viennent ajouter du piment et du suspense en deuxième partie de récit.
Si l’ambiance est à nouveau foncièrement sombre, avec des actes d’une violence parfois extrême, Jussi Adler Olsen parvient à nouveau à y insuffler un ton assez léger en y intégrant beaucoup d’humour. Ce ton singulier, insufflé par des enquêteurs singuliers et parfois assez borderline, apporte une touche de légèreté qui augmente le plaisir de lecture.
Vivement la prochaine enquête !