Les félins

Publié le 12 septembre 2016 par Le Journal De Personne
Un beau jour ou peut-être une nuit...

Quelque chose de sublime s'est produit

J'ai recueilli un chat sauvage

Difficile à apprivoiser, à mettre en cage

Je l'ai logé, nourri, soigner

Sans toucher à sa liberté

À son goût prononcé pour l'indépendance

Je ne l'ai pas dressé, ni cherché à le redresser

Ni domestiqué, ni contraint et forcé

À s'appliquer, à se compliquer la vie ou à s'impliquer dans mon circuit.

J'ai préféré m'impliquer dans le sien

Celui de l'instinct... celui de l'instant

Je l'aimais... il ne me détestait pas

Nous avions je crois, le même tempérament

Du mécontentement et très peu de ronronnement

Et peut-être aussi une certaine légèreté

C'est la lourdeur que nous avions du mal à supporter

Ni commandement, ni obéissance

Sous l'empire des sens et des sensations

Par-delà le songe et le mensonge des sentiments

Je l'ai appelé : Sango

Et avec lui, je n'ai jamais utilisé d'autre mot

Il quittait la maison aux aurores

Et il revenait au crépuscule

Pour miauler, manger et dormir

Je ne sais pas lequel de nous deux avait l'œil sur l'autre,

Lequel avait le plus besoin de l'autre

Son réflexe ou ma réflexion ?

Mais notre animalité nous dispensait de ce genre de futilité...

J'oubliais... Sango n'a jamais supporté

La maison, les murs, les cloisons

Je l'ai toujours servi dehors

Dedans il se serait donné la mort

C'est ce détail qui va nous faire du tort...

Une nuit... ou peut-être un jour maudit

Débarqua un autre chat, un chat noir

Plus coriace et plus vorace que Sango.

Avec ma manie des mots, je l'ai appelé Congo !

Il avait quelque chose d'indomptable cet escroc

Il avalait à lui seul toutes les croquettes

Et excellait dans ce genre de racket

Un chat voyou, fait pour troubler la fête

Et même lorsque je fais deux parts, il accapare les deux

Congo a fini par affamer Sango

Qui était beaucoup moins costaud, plus raffiné et moins belliqueux

C'est toujours l'intrus qui a le dernier mot

Sango a maigri, un peu trop maigri

Perdait sa verve et son énergie

Il ne revenait plus qu'une nuit sur deux

C'est Congo qui désormais occupait les lieux

Même parmi les chats, il y a Un dominant et un dominé

De l'étrange et de l'étranger

Pour résoudre cette détestable inéquation

Et cesser de me morfondre avec le fruit de mon adoption

J'ai décidé d'éloigner Congo

De le chasser de ce qui me paraissait ressembler à un paradis

Je lui ai fait faire une petit tour en voiture et lâché à 100 bornes de la maison

Dans une résidence suffisamment riche pour l'accueillir

Et nous ne l'avons plus jamais revu !

Sango a repris ses habitudes et sa solitude

Retrouvé sa faim manifeste et sa joie dissimulée.

Mais moi... ça m'a terriblement marqué, Je l'ai terriblement regretté...

J'en ai souffert et j'en souffre encore... d'être et d'avoir été propriétaire si austère au propre et au figuré...

J'aurais mieux fait de trouver les moyens pour les faire coexister, cohabiter, partager... au lieu de les départager cruellement...

Sango n'a rien de plus ni de mieux que Congo

Si ce n'est que l'un fut là avant l'autre... concours de circonstances... qui en dit long sur le hasard des naissances

À chaque fois que je vois Sango, je pleure Congo...

Peut-être parce que je ne fus pas assez forte pour aimer la force, ni assez fine pour concilier deux félins, deux orphelins...

Moralité : Nous entendons tous la porte du paradis.

Les plus vaniteux comme les plus valeureux...

Sauf que les plus vaniteux l'entendent lorsqu'elle se referme

et les plus valeureux lorsqu'elle s'ouvre...