Avant il n'y avait pas les réseaux sociaux ni les téléphones portables, ces nouveaux tyrans à l'air cool. Avant les écrivains et les artistes étaient protégés dans leur monde si singulier des mots et des sensations sans être contraints de s'exposer pour mettre en avant leur travail. Avant nous avions le goût du secret. Avant nous faisions l'amour dans des lits aux draps défaits. Avant nous évoquions brièvement nos appartenances religieuses sans en faire tout le barnum que l'on en fait aujourd'hui et trinquions à la santé d'un ciel habité de nuages. Avant nous étions encore capables de nous envoyer de longues lettres humides que nous décachetions avec précaution et que nous conservions dans des tiroirs secrets. Avant nous pouvions aborder certains thèmes en toute sérénité ou avec un vif et sain emportement et débattre les yeux dans les yeux sur nos accords et désaccords sans être confrontés à l'avocat de l'accusation qui sommeille dans le clic de tant d'internautes. Avant les débats étaient chez Polac, Chancel ou Pivot. On y voyait Coluche, Bukowski, le Professeur Choron, Godard, Renaud, Brassens, Desproges et Sagan. Avant, nous étions plus heureux et plus libres. Tout simplement.