En identifiant la présence abondante dans le cerveau humain de nanoparticules de magnétite dérivées des microparticules (PM) en suspension de la pollution urbaine, cette équipe internationale soulève toute une série de questions. D’abord parce que ces magnétites à l’échelle nanométrique peuvent répondre, tels des nano-aimants aux champs magnétiques extérieurs, ensuite parce qu’elles sont impliquées dans la production d’espèces réactives de l’oxygène (ROS) dommageables pour le cerveau : la production accrue de ROS est largement impliquée dans le développement de maladies neurodégénératives telles que la maladie d’Alzheimer. Ces travaux, présentés dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine dessinent ainsi un premier lien physique entre la pollution et l' » Alzheimer « .
Jusque-là, les scientifiques qui n’ignoraient pas que le cerveau recèle de particules magnétiques supposaient que ces particules dérivaient naturellement du fer utilisé dans la fonction cérébrale normale. Les chercheurs des Universités de Lancaster, d’Oxford, de Glasgow et de Manchester, en collaboration avec les universités de Mexico et du Montana font une toute autre hypothèse, celle de l’exposition à la pollution, et rappellent que ces microparticules en suspension dans la pollution sont <à 200 nm de diamètre et donc peuvent pénétrer directement dans le cerveau via le nerf olfactif et en traversant l’appareil olfactif endommagé. Ainsi en vivant en ville, il y a un risque élevé d’avoir le cerveau » truffé » de nano-aimants et toute la magnétite trouvée dans le cerveau pourrait donc ne pas être attribuable aux processus biologiques internes.
Quelle pollution ? Ces travaux suggèrent que la plupart des magnétites trouvées dans le cerveau humain, composées d’oxyde de fer magnétique serait donc d’origine environnementale, précisément dérivée de la pollution atmosphérique industrielle. Lorsque l’équipe examine, par techniques d’imagerie à haute résolution, des échantillons post-mortem de matière cérébrale issue des cortex frontaux de 37 cerveaux humains, elle identifie des particules de magnétite en forme de nanosphères rondes et non de formes tétraédriques ou octaédriques comme c’est le cas à l’issue des processus biologiques internes. D’autres nanoparticules de métaux qui n’ont pu être produites naturellement dans le cerveau, sont également détectées.
La pollution facteur de risque d’Alzheimer ? C’est une hypothèse. Cependant le lien peut être suggéré plus largement avec l’ensemble des maladies neurodégénératives voire des troubles neuronaux. On ne peut éviter de penser aux troubles du spectre autistique ou encore au TDAH, tous deux déjà associés à l’exposition, in utero à la pollution. Ces résultats soulèvent finalement l’hypothèse d’un nouveau facteur de risque environnemental alarmant. Sur la maladie d’Alzheimer plus précisément, de précédentes études ont montré une corrélation entre des quantités élevées de magnétite dans le cerveau et le développement de la maladie. Des études plus récentes suggèrent que la magnétite augmente la toxicité des plaques β amyloïde caractéristiques de la maladie.
La magnétite est toxique : ces nano-aimants provoquent le stress oxydatif qui perturbe la fonction cellulaire en contribuant à la production de radicaux libres destructeurs. On en revient à l’Alzheimer avec des types de dommages similaires sur la signalisation cellulaire.
D’autres travaux restent donc nécessaires pour confirmer la connexion entre pollution, magnétite et maladie d’Alzheimer, mais ces données appuient déjà l’hypothèse d’une infiltration de particules métalliques de la pollution, vers notre cerveau.
Source: PNAS July 25, 2016 doi: 10.1073/pnas.1605941113 Magnetite pollution nanoparticles in the human brain
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