« La plupart des gens qui se plaignent des assistés ont des assistants.
Cette règle majeure concerne l’espèce humaine toujours assez bavarde et prête à trouver des boucs émissaires.
C’est dit sans ambiguïté dans une des salles du Pico Pico (une centaine de bars en sous-sol), où l’on projette des films en noir et blanc sur les murs et personne ne se lève pour contester ça, cette proposition féroce.
La plupart des gens qui se plaignent des assistés ont des assistants, c’est l’avis de Jacques Marchal et il peut le prouver, l’argumenter, en expliquer la logique. La logique de l’envie. La logique de la rancœur. Il faut voir et entendre l’arrogance des propos contre les assistés. Selon lui, cela vient surtout du parti de la plainte dont le carburant principal est la lamentation, la répétition de la plainte et la traque des profiteurs de tous bords. Rien ne convient au parti de la plainte, rien ne peut lui convenir d’autre que la doléance, ni la droite ne peut leur convenir ni la gauche, ni le centre, ni le blanc ni le rouge ni même le bleu, ni l’Europe, ni Bruxelles, ni Strasbourg, ni le gouvernement, ni l’euro, ni les étrangers, ni les parlementaires, ni les journaux, ni les radios, ni les télévisions, ni l’université, ni les philosophes, c’est une obsession des mains propres et de la pourriture, de la gangrène, un désir de gémissement, une lamentation continue, un mépris, une morgue sans fin et désespérée, une pleurnicherie sans fond. Ce sont les danaïdes de l’amertume et du reproche. La soupe n’est jamais assez bonne. Il faut en baver et en faire baver.
Ils ne se rendent pas compte de leur état. Leur ressentiment est profond et semble sans fin. Jamais rien n’ira. Laura Yun dit qu’ils manquent profondément de tout à un point insensé, ahurissant, un état où la carence se nourrit de trous et d’envies, de manques et de haines, de boucs émissaires et de coupables à désigner. »
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Publié le par jpostende