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L'enlèvement, de Claudine Houriet

Publié le 30 août 2016 par Francisrichard @francisrichard
L'enlèvement, de Claudine Houriet

Existe-t-il un au-delà? S'il existe, comme personne n'en est revenu pour dire comment il est, alors chacun se fait sa religion sur le sujet. Les soi-disant rationnels prétendent qu'il n'existe pas, mais, en réalité, il n'y a pas plus de raisons en faveur de sa non-existence que de son existence. Alors seule l'intuition personnelle a de valeur pour soi.

Il y a celles et ceux qui n'admettent pas non plus que la mort puisse exister. Ils ne se posent pas tant la question de l'au-delà que la question de l'ici-bas. Comment continuer à vivre quand un être cher est mort et a donc été enlevé à son affection? A fortiori quand il s'agit de la chair de sa chair, c'est-à-dire d'un enfant, unique qui plus est.

Dans L'enlèvement, Claudine Houriet aborde ces deux sujets que sont l'au-delà et la mort d'une manière originale. Car, dans ce roman, une mère, Clara, ne se résout pas à la mort de sa fille, Marielle, victime à douze ans d'une chute malencontreuse lors d'une sortie d'école en forêt, sa nuque ayant heurté une grosse racine.

Apparemment Clara fait comme si Marielle n'était pas morte et continue à lui parler comme si rien ne lui était arrivé. Evidemment toutes les autres personnes la prennent pour une folle, qui parle toute seule et ne peut faire son deuil. En réalité Clara est parvenue à maintenir sa fille vivante de force et à l'empêcher de parvenir au paradis des enfants. 

Marielle est en effet invisible ici-bas et n'a pas pour autant atteint l'au-delà. Elle se situe dans une sorte d'entre-deux improbable. Seule sa mère la voit, lui parle, continue de vivre en sa présence, tandis que son père se contente de la pleurer, de se recueillir sur sa tombe, de se perdre dans ses souvenirs et de continuer à vivre vaille que vaille.

Marielle pense que sa mère a eu tort de l'avoir arrachée à un paradis à peine aperçu, à peine effleuré: elle aurait dû lui demander son avis avant de la retenir pour lui forger une existence de rêve. Aussi sa situation est-elle inédite et Marielle peut-elle se dire, s'adressant à sa mère: Je suis à la fois sous terre et à tes côtés. A la fois morte et vivante.

Cette situation incompréhensible pour les autres va être à l'origine de bien des vicissitudes pour les protagonistes de cette histoire et faire naître de terribles dissensions entre le père et la mère, qui ne se comprennent plus du fait que leur fille est morte pour l'un et vivante pour l'autre, entre la mère et la fille, l'une voulant faire le bonheur de l'autre, mais contre le gré de celle-ci.

Le lecteur se demande si ce merveilleux et terrible secret entre la mère et la fille, qui lie l'existence de l'une à celle de l'autre indissolublement, sera accessible un jour à ceux qui les aiment. Il en doute, tout le long du récit. Car comment leur serait-il possible de considérer l'apparente névrose de Clara comme le réel enlèvement à la mort de Marielle? Le lecteur ne le saura que quand l'histoire se dénouera.

Francis Richard 

L'enlèvement, Claudine Houriet, 208 pages Éditions Luce Wilquin

Livre précédent chez le même éditeur:

Le mascaret des jours (2014)


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