Vendredi était la soirée où officiait les deux grands groupes que sont Neurosis et Godspeed You ! Black Emperor. Chacune de ces formations ont quasiment à elles seules défini un genre de musique au travers des années 90 et qui ont su perdurer jusqu'à aujourd'hui si bien qu'elles ont un statut quasi mythique en post-rock pour Godspeed et en post-metal pour Neurosis. En fait Neurosis EST le post-metal…
Comme à son habitude, pas un mot n'est prononcé et les morceaux s'enchaînent sans pause. Les membres du groupe jouent pour la plupart assis et courbés sur leur instruments sans prêter attention au public : leur musique s'exprime d'elle-même. Mis à part le dernier morceau, le groupe a pris la décision de ne jouer que leurs morceaux les plus récents non seulement plus courts mais aussi plus rock se prêtant bien au cadre d'un festival – qui a d'ailleurs aménagé sa grille à la dernière minute afin de permettre au groupe de jouer 1h30. Dans mon souvenir, la setlist est la même que celle qu'ils avaient proposé aux Docks à Lausanne l'année dernière. C'est un bon show – rodé certes – et le son a été à la hauteur de la musique de ce groupe mythique pour tout fan de post-rock qui se respecte et les festivaliers ont eu l'air comblé.
Nous faisons un petite pause avant Neurosis alors que Mutoid Man se produit sur la petite scène sous la tente avec son hardcore juvénile avec force double pédales assommantes et ses guitares tonitruantes.
Il est 23h30 pile lorsque Neurosis monte sur scène. Comme toujours, le quintet de Oakland ne prononce pas un mot et assène les premiers accords de 'Given to the Rising', titre d'ouverture de l'album du même nom. Tout de suite, la fureur du son frappe le public, la présence scénique des membres du groupe est intense – si en 2008 Scott Kelly s'est blessé au front sur son micro pendant le concert, cette année, il est en nage après 45 minutes si bien que dans l'atmosphère refroidie du Locle, il a commencé littéralement à fumer… Il s'en suivra les morceaux 'Locust Star', 'Lost', 'Bending Light' ainsi que deux inédits à ma connaissance. Le set se clôture sur le magnifique 'Stones From the Sky' et le groupe sort aussitôt le morceau terminé pour ne pas revenir : leur messe remplie de désespoir et de colère est dite – au grand dam d'une grande partie du public.
Si la musique de Neurosis aussi bonne – excellente même – qu'elle soit n'est pas des plus joviale, c'est un voyage introspectif qui demande beaucoup d'engagement émotionnel de la part de l'auditeur – pour certains, c'est un voyage qui coûte cher tant les compositions sont lourdes et prenantes. Le terme doom metal aurait pu être inventé pour eux si Neurosis n'avait pas été la définition même du post-metal. Tour à tour, les thèmes abordés dépeignent une vision apocalyptique du monde, une négligence totale des forces vitales du monde, les pièges du passé mais propose aussi de trouver une certaines forme de catharsis dans The Eye of Every Storm : il faut l'avouer c'est une musique assez exigeante qui mélange bon nombre de styles qui colle bien à l'étiquette metal expérimental du groupe. Personnellement, je suis souvent sorti des concerts de Neurosis comme si j'avais reçu des coups et cette fois-ci n'a pas fait exception. Comme on l'a résumé avec deux autres chroniqueurs de Lords : Neurosis c'est pas cool mais c'est tellement bien !
Après ces deux concerts assez exigeants, il était temps de rentrer car la soirée du samedi promettait d'être longue bien que bien différente.