Julie Klein et Philippe Devouassoux, 2 jeunes ingénieurs, nous emmènent en immersion sur la mythique Route du Thé et des Chevaux, en empruntant autant que possible les mêmes chemins que les anciens caravaniers avant eux.
PROLOGUE (p. 13) – « Notre projet de voyage OTHER, acronyme de Old Tea and Horse Exchange Road, est né de la volonté d’expérimenter la rude vie des caravaniers, au plus près des étapes et des sentiers historiques, pour appréhender la diversité ethnique, culturelle, linguistique et religieuse des peuples à l’origine de la Chine moderne. Cette route fut en effet indispensable à la création du Céleste Empire : pendant plus de quinze siècles, les caravaniers ont échangé le thé du Yunnan et du Sichuan contre les destriers nécessaires à l’armée chinoise pour ses conquêtes. »
Dans ce livre, écrit à quatre mains deux ans après leur retour et publié en 2015, les 2 marcheurs partagent aussi bien les bons moments, les expériences enrichissantes que les déceptions, les blessures physiques et la succession d’imprévus inhérents à ce type de voyage périlleux.
Le petit bonnet a été marqué par l’hospitali-T. des villageois, qui ne disposent souvent que de peu de moyens, mais n’hésitent pas à inviter les deux étrangers chez eux pour partager un repas et passer la nuit. Le récit est jalonné de ces rencontres et invitations qui donnent au voyage un côté profondément humain.
LES PLANTATIONS DE PU’ERH (p. 141) – « Dans leur démarche d’inviter deux étrangers, nous sentons qu’ils veulent faire profiter leurs pairs de cette présence improbable. Provoquer la rencontre entre des Occidentaux et des gamins du village, leur donner l’opportunité de voir des Européens en vrai et non pas à travers le miroir déformant du petit écran. Cette démarche altruiste nous émeut profondément. Nous la revivrons fréquemment par la suite. C’est la première fois que nous touchons l’un des aspects essentiels de notre voyage : nous sommes malgré nous et du simple fait de notre présence, les représentants d’un monde méconnu, voire menaçant. Cette prise de conscience donne soudain un sens profond et imprévu à notre projet. Nous nous efforçons de véhiculer, tels des messagers, une image de fraternité. »
Julie Klein et Philippe Devouassoux ont fait le choix judicieux de livrer leurs impressions et réflexions en toute franchise. Leur récit est nourri d’informations complémentaires bien documentées, prenant soin d’éviter la description uniquement factuelle et linéaire de leur itinéraire.
Sont ainsi abordés les thèmes du rôle de la femme en Chine, la religion, la politique, les rites et traditions, les 56 ethnies chinoises, les différences d’habitudes et de styles de vie à la fois entre les régions qu’ils traversent et entre la Chine et l’Europe, la culture et la transformation du thé…
LA CUEILLETTE DU THÉ (p. 190) – « La plantation se représente comme une immense forêt composée de petits arbres dépassant rarement 1,50 mètre de haut. Leurs troncs, épais et tortueux, sont le signe d’un âge plus avancé que ne le suggère leur taille. À l’état sauvage, les théiers peuvent atteindre 15 à 20 mètres de haut. Lorsqu’ils sont cultivés, ils sont maintenus à 1,20 mètre environ, par des coupes régulières pour former ce qu’on appelle une ‘table de cueillette’, qui facilite la récolte manuelle et favorise la croissance des bourgeons. La récolte se fait à la main. Les jeunes filles sont les cueilleuses les plus habiles, car, dit-on, leurs mains prélèvent sans abîmer. La collecte ne porte en effet que sur les jeunes pouces, voire uniquement sur les bourgeons pour les thés les plus rares. Sur le mont Mengding, on sent bien que les exploitations sont familiales. »
On se plonge pas à pas dans ce roman, le temps de finir une théière géante (surtout à la vitesse à laquelle le petit bonnet boit), prêts à repartir avec eux pour de nouvelles aventures sur la route du thé.
ÉPILOGUE (p. 317) – « Les grandes étendues traversées au rythme lent de la marche, qui s’achèvent par une invitation à partager la vie quotidienne d’une famille isolée, sont une telle source de jouvence, que nous avons souhaité poursuivre cette expérience. La marche nous ramène à notre humanité, nous autorise enfin à prendre le temps et à cheminer librement. La simplicité des échanges qu’elle engendre nous ravit, surtout en regard de la complexité des relations tissées dans nos vies urbanisées. Nous avons donc décidé de repartir, à pied, pour une nouvelle migration. »
› La Route du Thé – Julie KLEIN et Philippe DEVOUASSOUX.
Éd. Transboréal
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