On sait que la privation de sommeil ou une horloge biologique déréglée peut altérer l’expression de centaines de gènes impliqués dans l’inflammation, l’immunité, et la réponse des cellules au stress. Alors notre vulnérabilité à l’infection varie-t-elle en fonction de l’heure de la journée et donc en fonction de notre horloge biologique ? Cette étude expérimentale de l’Université de Cambridge a vérifié ce principe chez la souris, exposée à un virus à différents moments de la journée. Les conclusions, présentées dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine, suggèrent que les virus savent aussi exploiter les mécanismes de notre horloge interne pour mieux se propager.
Les chercheurs ont émis l’hypothèse que l’horloge interne du corps, qui est constamment en train de réguler, de commuter ou de désactiver des fonctions de notre organisme, peut aussi avoir un impact sur la propagation d’un virus. En effet, lorsqu’un virus nous infecte, il utilise nos cellules pour se propager et nos cellules vivent au rythme de nos horloges.
Les chercheurs de Cambridge ont donc infecté des souris soit avec le virus de la grippe soit le virus de l’herpès, au début de la journée, au début de leur phase de repos ou au début de leur phase active ou encore 10 heures après le début de la journée. L’expérience a été menée chez des souris » normales » équipées de » gènes de l’horloge » et des souris génétiquement modifiées pour être privées de ces gènes. Après avoir été exposées au virus, les souris ont passé 12 heures à la lumière du jour et 12 heures puis 12 heure dans l’obscurité. Après six jours, les cellules des souris ont été analysées pour évaluer la charge virale et le niveau de propagation. L’analyse montre que :
- Lorsque les souris ont été infectées au début de la journée, ce qui correspond pour elles au début de leur phase de repos, la réplication du virus était 10 fois plus élevée que chez les souris exposées au virus au début de leur phase active.
- En revanche, chez les souris privées de gènes de l’horloge, les chercheurs observent des niveaux élevés du virus quelle que soit l’heure et la phase -repos ou activité- auxquelles les souris ont été infectées.
La conclusion est que les virus aussi savent exploiter les rouages de l’horloge à leur bénéfice, pour mieux se propager via les cellules hôtes. Les résultats semblent suggérer, chez la souris, qu’une exposition à un virus juste avant la période de repos conduit à une plus grande réplication virale.
Et chez les humains ? Si ces données, obtenues sur la souris, doivent encore être confirmées ou précisées chez l’Homme, elles peuvent néanmoins susciter des inquiétudes aux personnes contraintes de gérer une horloge perturbée, par les déplacements et les décalages horaires, ou le travail de nuit ou par quarts. Il reste à apprécier dans quelle mesure la susceptibilité à l’infection est réellement accrue en fonction de l’heure de la journée. Et si même alors la réplication virale est significativement plus élevée, cette différence est-elle suffisante à impacter la sévérité de la maladie ou des symptômes ?
Source: PNAS August 15 2016 doi: 10.1073/pnas.1601895113Cell autonomous regulation of herpes and influenza virus infection by the circadian clock
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