Ike Tucker vit dans le désert californien aux côtés de son oncle Gordon. Sa mère l'a laissé là un beau jour avec sa soeur Ellen, puis Ellen est partie à son tour pour fuir ce bout du monde. Ike est resté. Jusqu'à ce qu'un jeune homme vienne à lui pour lui signifier la disparition de Ellen. Ike décide alors de partir lui aussi pour les plages de Californie sur les traces de sa soeur. Muni des trois noms de types avec qui Ellen serait partie au Mexique, Ike arrive à Huntington Beach et comprend rapidement que s'il souhaite des informations il va lui falloir intégrer le monde particulier des surfeurs. Il achète alors sa première planche, conseillé alors par Preston, ancien surfeur émérite. Peu à peu il glâne des informations ici et là sur les personnes que sa soeur a fréquentées, même si le silence semble être de mise dans cet univers à la violence sous-jacente. Si la tension est palpable, le surf offre aussi à Ike des moments suspendus, en harmonie totale avec la nature :
"La mer était sombre et tout autour de lui des rubans de lumière scintillaient puis s'évanouissaient comme des bancs de poissons. A l'horizon le soleil avait commencé à fondre, rouge au-dessus d'une mer pourpre. La marée était basse et les vagues dirigeaient leurs faces noires vers le rivage tandis que des traînées de brouillard s'élevaient de leur crête déchiquetée en de minces arcs dorés qui montaient dans le ciel, s'étiraient puis retombaient dans la mer, éparpillant leur lumière sur la surface comme des flammèches. Il y avait une qualité cyclique dans tout cela, dans les jeux de lumière et le mouvement de la houle. C'était un moment incroyable, et Ike se sentit soudain en prise avec tout ce qui l'entourait, sentit qu'il en faisait partie de façon quasiment organique. Ce sentiment lui fit prendre conscience d'une nouvelle gamme de potentialités." p. 92
http://www.meltyxtrem.fr/top-20-des-plus-belles-photos-de-tubes-en-surf-a527313.html
Ike devra aller au bout des rêves des surfers et de sa soeur pour en découvrir le revers...
"Il revit la jetée, les hordes de surfers se battant pour une vague, le zoo d'une ville tapie dans le sable, et ce qui avait jadis pu passer pour du désir et de la vitalité n'avait plus qu'un air de désespérance et d'épuisement au goût de cocaïne, oui ils avaient tous perdu et il ne restait plus qu'une grande vague qui les emportait et par-dessus laquelle il était impossible de revenir." p. 268
Kem Nunn peint un monde dans lequel les jeunes testent leurs limites, des êtres qui fuguent pensant vivre une expérience unique sur les plages de Californie, des silhouettes errantes à la recherche de la liberté mais découvrant aussi les risques inhérents à cette liberté et à ces milieux flirtant avec les interdits. Derrière les clichés édulcorés des surfeurs se tapit une vérité bien plus complexe qui préfigure le naufrage d'un rêve au goût d'infini.
Surf city, Kem Nunn, traduit de l'américain par Philippe Paringaux, folio gallimard, 1995, 336 p.,