Quelle bonne idée d’avoir traduit ce one-shot transalpin écrit et dessiné par le couple d’Italiens Teresa Radice et Stefano Turconi et récompensé par le prix du meilleur roman graphique au festival de BD de Lucca en 2015 !
« Le port des marins perdus » invite à suivre la quête identitaire d’un jeune homme amnésique retrouvé sur la plage d’une île au large du Siam, à l’automne 1807. Au fil de nombreuses rencontres, ce garçon qui ne se souvient que de son prénom, retrouve progressivement les traces de son passé. Du jeune capitaine William, qui l’a recueilli, aux trois filles du capitaine Stevenson, qui le logent dans l’auberge de leur père, en passant par Rebecca, une tenancière de maison close éprise de poésie, ou Nathan Mc Leod, un capitaine de la marine marchande qui le prend son aile, Abel croise la route de nombreux personnages hauts en couleurs.
Cette aventure maritime saupoudrée de fantastique happe le lecteur durant plus de 300 pages, l’emmenant des côtes du Siam à l’Angleterre, en passant par l’île de Pâques. Ce récit mêlant chasse au trésor, tempêtes et chants marins est non seulement romanesque, mais également littéraire et poétique car, en intégrant de larges extraits des œuvres de Samuel Taylor Coleridge à William Blake, en passant par Lord Byron, l’auteure y met à l’honneur les grands poètes anglais du début du XIXe siècle.
L’aspect onirique et romantique de l’ouvrage est encore renforcé par le trait fin et élégant de Stefano Turconi. Malgré une impression d’inachevé propre au crayonné et le regret de ne pas retrouver la superbe colorisation de la couverture à l’intérieure de l’album, ce dessin à la mine de plomb finit par séduire au fil des pages, tellement il insuffle de l’expressivité aux personnages et de la beauté aux paysages.
Un roman graphique que l’on referme en regrettant d’être arrivé à destination tellement le voyage était plaisant.
Retrouvez d’ailleurs cet album dans mon Top BD de l’année !