Analyse du marché de l'électro, DIY, militantisme... Rencontre avec Jean-Claude alias Varoslav, le patron du label parisien Rue de Plaisance.
Pour une première fois au Weather Festival (à Paris), c'est plutôt passé crème. Dure tâche aussi qui lui a été confiée de réunir un public venu à la première heure pour l'écouter. Il ouvrait effectivement les festivités samedi 4 juin en jouant le premier, l'après-midi, sous un ciel grisonnant. Grisante performance, d'ailleurs, qu'il a livrée ce jour-là.
_____Même pas peur de fonder un label tout seul à trente ans ?
Je l'ai fondé en 2011, donc bien avant mes trente ans. Par ailleurs c'est vrai que depuis que j'ai créé Rue de Plaisance, je m'occupe plus que de ça. Ça me prend beaucoup plus de temps que j'avais imaginé. J'ai ma petite amie aussi qui m'aide maintenant dans le label, elle s'occupe de gérer ma promotion, elle en fait carrément partie. J'ai une politique assez particulière avec les gens avec qui je signe. J'ai pas envie de signer avec seulement quatre artistes, j'ai envie d'un label qui pourrait être éclectique. C'est vrai qu'on fait essentiellement de la musique électronique, de la house, de la techno... mais on essaye aussi de s'orienter vers l'ambient, et ça nous du coup l'occasion de travailler avec pas mal d'autres artistes aussi. Ouais, on doit avoir au moins vingt artistes signés.
Principal cliché, on prête souvent le côté précaire au monde de la techno. Vrai ou faux ?
Me concernant, il y a huit ans j'ai commencé à vouloir monter ma boîte en autoentrepreneur sans rien connaître des démarches. Puis après au fur et à mesure, avec mon comptable, j'ai commencé à comprendre un peu plus ce qui se passait mais on peut le dire, qu'aujourd'hui c'est très difficile. Quand tu es artiste avec ce statut, tu ne cotises pas, tu n'as pas d'aides. Il faut s'entourer systématiquement de professionnels.
Comment perdures-tu alors dans ce milieu de requins ?
Si on en est là aussi, c'est qu'on a des sorties régulièrement. Depuis que j'ai monté le label je n'ai pas eu de vacances, tu vois. La musique me fait voyager, c'est sûr, mais ce n'est pas des vacances. L'année dernière avec ma petite-amie on est allés au Pérou parce que j'y ai fait deux dates, c'était super. Donc mon tourneur avait payé mon billet pour mixer dans le pays, j'en ai pris un pour ma copine et on est resté quinze jours au Pérou. C'est seulement ça, nos petites vacances quand on est musicien et qu'on tourne.
Personnellement, j'ai commencé à évoluer dans la musique il y a quinze ans quand j'ai acheté mes premières platines. Je suis par ailleurs toujours resté fidèle à cet état d'esprit. Même dans mes productions lorsque des disques marchaient, j'ai toujours essayé de ne pas rester dans la facilité. L'EDM, au contraire, je trouve qu'elle a presque aidé notre musique à se développer. Moi j'écoute de la techno depuis vingt ans et cette émergence et cette démocratisation du genre, on la doit peut-être à l'EDM. Des gars comme David Guetta qui font une musique que j'affectionne pas trop, ont justement permis de rendre la techno moins marginale. A côté de ça, ça permet aujourd'hui à des festivals comme le Weather d'exister, au final.
Le Weather à plus trait à la musique techno qu'électro d'ailleurs...
Particulièrement. Il fait partie des festivals les moins éclectiques, avec son propre style au regard de festivals parisiens comme We Love Green qui ont des programmations plus diverses. Pour moi, le Weather c'est la consécration de la musique underground. C'est le meilleur festival qu'on a en France au niveau de la qualité du line-up. Je trouve ça génial ce qu'ils ont réussi à faire, c'est-à-dire réunir des milliers de personnes autour d'une musique sur laquelle personne n'aurait parié un kopeck il y a quinze ans.