Le libraire de Régis de Sa Moreira au diable vauvert
Vous l’avez lu ?
– Oui, dit le libraire.– Moi aussi, répondit le jeune homme.
Le libraire lui sourit. Le jeune homme prit confiance :
– Mais je l’ai offert à quelqu’un… à qui je n’aurais pas dû l’offrir.
– C’est difficile d’être sûr de ces choses-là, répondit le libraire.
– Oui, dit le jeune homme.
– Ne désespérez pas, dit encore le libraire. Certains livres sont à retardement…
Le jeune homme réfléchit.
-Certaines personnes aussi, répondit-il."
"Le libraire avait perdu ses amis le triste jour où il avait découvert qu’il était devenu pour eux un sujet de conversation.
Plus exactement, le libraire s’était ce jour-là rendu compte qu’il avait perdu ses amis. Quelques mots maladroits, des expressions trop identiques, des conseils ou des reproches étrange- ment rapprochés avaient peu à peu fait découvrir cela au libraire.
Jusqu’au jour triste où il l’avait entièrement découvert. Malgré ses efforts, le libraire n’avait pas réussi à comprendre comment des amis avaient pu en arriver là.
Aussi avait-il compris qu’il avait perdu ses amis. Ceux-là mêmes qui continuaient d’aborder dans leurs conversations le sujet du libraire pour s’étonner ensemble de son éloignement."
Le Libraire, (en lecture ici) c’est une mosaÏque de fragments de vie qui raconte le libraire, sa vie, ses joies, ses peines, ses anciens amis, son amour perdu, ses dix frères et sœurs, et tous ses clients. C’est un tableau, un tableau vivant cependant, d’un libraire dans sa librairie.
Dans une langue à la fois sobre et rêveuse, Régis de Sa Moreira nous parle de l’amour des livres et des hommes. Amour parfois teinté de dépit et d’incompréhension. Les situations sont poétiquement décalées, l'humour prégnant. Un livre qui peut s’avaler en une bouchée (retenez-vous, degustez !) mais laisser un goût doux-amer. Son écriture est fraîche, drôle et poétique, il met en scène la vie quotidienne, des héros ordinaires, parfois avec extravagance, mais toujours avec justesse.Voici un message d'un des lecteurs (malheureusement anonyme) du livre :L'abstraction et la poésie ne tombent pas de façon innée dans le berceau de chacun.
Les personnes dont l'imaginaire est égal à un encéphalogramme plat ne ressentiront rien à la lecture de ce livre. Il faut avoir en soi un petit quelque chose de sensible, de rêveur. Être capable d'une attention et d'une réflexion que l'on cultive avec un petit effort intellectuel... Bref, en un mot j'ose écrire ici, que ce livre est parfaitement délicieux, tout y est joliment dosé (même le nombre de pages qui est plutôt mince). "Le libraire" ouvre une mignonne petite porte sur nos propres rêves.Encore faut-il en avoir...
au Diable vauvert Pas de temps à perdre (lauréat du Prix Le Livre Élu en 2002), Zéro tués, Le Libraire, Mari et femme et La vie